Voisinage & Conflits

Travaux du Voisin : Horaires Autorisés et Recours

Travaux du voisin : horaires autorisés et recours en cas de nuisances

Temps de lecture : 9 minutes

Votre voisin fait des travaux depuis des semaines et le bruit devient insupportable ? Entre le marteau-piqueur à 7h du matin et la perceuse le dimanche, vous ne savez plus comment réagir. Bonne nouvelle : les horaires de travaux sont strictement encadrés et vous disposez de plusieurs recours. Les nuisances sonores constituent un trouble anormal de voisinage sanctionnable, même si les travaux sont parfaitement autorisés par la mairie. En revanche, si votre voisin construit sans permis ou dépasse les limites de son autorisation, vos moyens d'action sont encore plus étendus. Voici les règles à connaître et les démarches pour faire cesser les nuisances.

Sommaire

Les horaires de travaux autorisés

Les horaires fixés par arrêté préfectoral ou municipal

Les horaires de travaux bruyants sont généralement fixés par arrêté préfectoral ou municipal. La plupart des communes appliquent les créneaux suivants :

Jour Horaires autorisés
Lundi à vendredi 8h00 – 12h00 / 14h00 – 19h30
Samedi 9h00 – 12h00 / 15h00 – 19h00
Dimanche et jours fériés Interdits (sauf urgence)

Ces horaires peuvent varier selon les communes. Paris, par exemple, autorise les travaux de 7h à 22h en semaine pour les chantiers professionnels. Renseignez-vous auprès de votre mairie pour connaître les règles locales.

Travaux de particuliers vs travaux professionnels

Une distinction existe souvent :

Travaux de particuliers (bricolage, jardinage) : horaires plus restreints, généralement interdits le dimanche et les jours fériés.

Chantiers professionnels (construction, rénovation) : horaires parfois plus étendus, mais avec des obligations de limitation du bruit.

Le cas des travaux urgents

Certains travaux peuvent être réalisés en dehors des horaires autorisés :

  • Fuite d'eau nécessitant une intervention immédiate
  • Panne de chauffage en hiver
  • Problème de sécurité (risque d'effondrement)

Ces exceptions doivent rester ponctuelles et ne justifient pas un chantier complet hors horaires.

Que dit la réglementation sur le bruit ?

Le Code de la santé publique

L'article R1336-5 du Code de la santé publique définit les bruits de voisinage comme une infraction lorsqu'ils portent atteinte à la tranquillité du voisinage par leur durée, répétition ou intensité.

Les sanctions prévues :

  • Contravention de 3e classe : 68 € (amende forfaitaire)
  • Jusqu'à 450 € en cas de récidive
  • Saisie du matériel bruyant possible

Le trouble anormal de voisinage

Même pendant les horaires autorisés, des travaux peuvent constituer un trouble anormal de voisinage si :

  • La durée est excessive (plusieurs mois sans interruption)
  • L'intensité dépasse les niveaux acceptables
  • Les précautions minimales ne sont pas prises

Le trouble anormal de voisinage est une notion jurisprudentielle qui permet d'obtenir des dommages-intérêts, indépendamment de toute faute. Le propriétaire voisin est responsable même s'il a confié les travaux à une entreprise.

Les niveaux sonores maximaux

Le décret du 31 août 2006 fixe les seuils :

  • Bruit excessif de jour : émergence > 5 dB au-dessus du bruit ambiant
  • Bruit excessif de nuit (22h-7h) : émergence > 3 dB

Un riverain excédé peut faire constater les niveaux par un huissier ou un acousticien agréé.

Vérifier l'autorisation d'urbanisme du voisin

Consulter l'affichage sur le terrain

Tout permis de construire ou déclaration préalable doit être affiché sur le terrain pendant toute la durée des travaux. Le panneau réglementaire mentionne :

  • Le nom du bénéficiaire
  • La nature des travaux
  • La surface créée
  • La hauteur de la construction
  • Les voies de recours

Si votre voisin n'affiche pas son permis, vous ne pouvez pas vérifier la légalité des travaux. L'absence d'affichage empêche également le démarrage du délai de recours de 2 mois.

Consulter le dossier en mairie

Tout tiers peut consulter un dossier de permis de construire ou de déclaration préalable en mairie. Demandez à voir :

  • Le formulaire CERFA avec les surfaces déclarées
  • Les plans (DP4, DP5, DP6)
  • L'arrêté d'autorisation

Cette consultation vous permettra de vérifier que les travaux réalisés correspondent à ce qui a été autorisé.

Que faire si le voisin construit sans autorisation ?

Si les travaux ne sont pas autorisés, plusieurs options :

  1. Signalement en mairie : la commune peut dresser un procès-verbal et mettre en demeure de régulariser ou démolir
  2. Dénonciation au procureur : infraction pénale passible de 6 000 € par m² d'amende
  3. Action civile : demande de démolition et dommages-intérêts

La prescription est de 6 ans sur le plan pénal et 10 ans sur le plan civil. Au-delà, les travaux non autorisés ne peuvent plus être poursuivis.

Les recours contre les nuisances

Le dialogue amiable

Première étape indispensable : parlez à votre voisin. Souvent, un simple échange permet de :

  • Rappeler les horaires autorisés
  • Convenir d'aménagements (pause déjeuner, limitation certains jours)
  • Obtenir un calendrier prévisionnel des travaux bruyants

Gardez une trace écrite (mail, courrier) de vos démarches amiables.

La médiation et le conciliateur de justice

En cas d'échec du dialogue, saisissez le conciliateur de justice (gratuit, disponible en mairie ou tribunal). Il peut :

  • Organiser une réunion de médiation
  • Proposer un accord amiable
  • Établir un procès-verbal de conciliation

Cette étape est parfois obligatoire avant toute action en justice.

Le recours gracieux contre le permis

Si vous estimez que le permis de votre voisin est irrégulier (non-conformité au PLU, distances non respectées), vous pouvez former un recours gracieux auprès du maire dans les 2 mois suivant l'affichage.

Le recours gracieux :

  • Est gratuit
  • Suspend le délai de recours contentieux
  • Doit être motivé (indiquer les règles violées)

Si le maire rejette votre recours ou ne répond pas sous 2 mois, vous pouvez saisir le tribunal administratif.

L'action devant le tribunal judiciaire

Pour les troubles de voisinage (bruit, nuisances), le tribunal judiciaire est compétent. Vous pouvez demander :

  • La cessation du trouble
  • Des dommages-intérêts (préjudice moral, perte de jouissance)
  • L'exécution de mesures de réduction du bruit

Un avocat urbanisme ou un avocat spécialisé en droit de la construction peut vous assister. Comptez 2 000 à 5 000 € d'honoraires pour une procédure simple.

Le recours des tiers contre le permis

Si votre voisin peut contester votre permis, l'inverse est vrai. Vous disposez de 2 mois à compter de l'affichage pour contester le permis de votre voisin devant le tribunal administratif.

Conditions pour agir :

  • Prouver un intérêt à agir (riverain direct, vue impactée, ensoleillement réduit)
  • Invoquer une violation des règles d'urbanisme (PLU, Code de l'urbanisme)
  • Respecter le délai de 2 mois

Si votre voisin fait opposition à votre permis, les mêmes règles s'appliquent : il doit prouver un préjudice et une illégalité.

Cas pratiques et exemples

Exemple 1 : Bruit de chantier hors horaires

M. Dupont subit depuis 3 semaines des travaux de démolition commençant à 7h, alors que l'arrêté municipal interdit les travaux avant 8h.

Démarches :

  1. Courrier recommandé au voisin rappelant les horaires
  2. Signalement à la police municipale (constat de l'infraction)
  3. Main courante au commissariat
  4. Si récidive : plainte pour tapage diurne

Résultat : amende de 68 € pour le propriétaire voisin, injonction de respecter les horaires.

Exemple 2 : Extension sans permis

Mme Martin constate que son voisin construit une extension de 30 m² sans aucun panneau d'affichage. Elle vérifie en mairie : aucune autorisation déposée.

Démarches :

  1. Signalement écrit en mairie (service urbanisme)
  2. La commune constate l'infraction
  3. Mise en demeure de régulariser ou démolir sous 3 mois

Coût pour le voisin : 30 m² × 6 000 € = jusqu'à 180 000 € d'amende potentielle + démolition si régularisation impossible.

Si le voisin avait déposé une extension de 20 m² ou plus, l'autorisation aurait été obligatoire.

Exemple 3 : Recours contre un permis de construire

M. et Mme Petit contestent le permis de leur voisin pour une surélévation qui créera un vis-à-vis direct sur leur salon.

Démarches :

  1. Recours gracieux auprès du maire (rejeté)
  2. Recours contentieux au tribunal administratif
  3. Expertise ordonnée par le juge

Résultat : permis annulé pour non-respect de la distance limite séparative. Le voisin doit modifier son projet.

Erreurs à éviter

1. Agir sans preuve

Avant toute démarche, constituez un dossier :

  • Photos datées des travaux
  • Enregistrements sonores avec date et heure
  • Témoignages écrits des autres voisins
  • Constats d'huissier si nécessaire

2. Dépasser le délai de recours

Le délai de 2 mois pour contester un permis est impératif. Passé ce délai, vous ne pouvez plus agir sur la légalité de l'autorisation. Seule reste l'action en trouble de voisinage.

3. Confondre droit privé et droit public

Le permis de construire autorise les travaux au regard des règles d'urbanisme. Il ne règle pas les questions de droit privé (distance de vue du Code civil, servitudes). Un permis valide peut quand même violer une servitude de passage ou une règle de prospect privée.

4. Négliger le dialogue préalable

Une action en justice contre un voisin détruit durablement les relations. Privilégiez toujours la médiation avant d'aller au tribunal.

5. Ignorer les recours administratifs

Contester un permis au tribunal administratif est plus efficace que de se plaindre en mairie après coup. L'annulation du permis oblige à tout recommencer.

Questions fréquentes

Mon voisin n’affiche pas son permis, que faire ?

L'absence d'affichage du permis est une infraction mais surtout, elle empêche le délai de recours de 2 mois de courir. Vous pouvez contester le permis tant qu'il n'est pas affiché, et ce jusqu'à 6 mois après l'achèvement des travaux. Signalez l'absence d'affichage en mairie et consultez le dossier pour vérifier l'existence d'une autorisation.

Peut-on mettre une clôture sans accord du voisin ?

Sur votre terrain, vous pouvez installer une clôture sans l'accord de votre voisin, sous réserve de respecter les règles du PLU (hauteur maximale, matériaux). Une déclaration préalable peut être nécessaire selon la commune. En revanche, une clôture mitoyenne (sur la limite exacte) nécessite l'accord du voisin ou une décision de justice.

Que faire si mon voisin dénonce ma construction sans permis ?

Si vous avez construit sans autorisation, deux options : régulariser en déposant un permis ou une déclaration préalable (possible si les travaux sont conformes au PLU actuel), ou faire face aux sanctions (amende jusqu'à 6 000 €/m², démolition possible). Après le délai d'instruction, vous obtiendrez une réponse. Une régularisation réussie vous met à l'abri des poursuites.

Mon voisin fait un recours contre mon permis, que faire ?

Consultez immédiatement un avocat spécialisé. Vérifiez que le recours est recevable (délai de 2 mois, intérêt à agir du voisin). Préparez votre défense en démontrant la légalité de votre permis. Vous pouvez continuer les travaux pendant la procédure, mais à vos risques : si le permis est annulé, vous devrez démolir. La durée de validité du permis reste suspendue pendant le recours dans certains cas.

Distance piscine limite propriété voisin ?

La distance minimale entre une piscine et la limite de propriété dépend du PLU de votre commune : généralement 3 m minimum, parfois plus. En l'absence de règle locale, le Code civil impose 3 m pour éviter les nuisances (bruit, éclaboussures). Une piscine de 10 à 100 m² nécessite une déclaration préalable.

Clôture mitoyenne : à quelle distance du voisin ?

Une clôture mitoyenne se situe exactement sur la limite séparative et appartient aux deux voisins. Elle nécessite leur accord commun pour la construction et l'entretien. Une clôture privative doit être implantée en retrait de la limite (quelques centimètres suffisent) pour rester votre propriété exclusive.

Conclusion

Les travaux du voisin peuvent être une source majeure de nuisances, mais des solutions existent. Commencez toujours par le dialogue, puis constituez un dossier de preuves si nécessaire.

Pour les nuisances sonores hors horaires autorisés, le signalement à la police municipale et la plainte pour tapage sont efficaces. Pour une construction non conforme ou non autorisée, le recours auprès de la mairie et du tribunal administratif permet d'obtenir l'arrêt des travaux.

Avant d'engager un recours contre le permis de votre voisin, vérifiez votre intérêt à agir et les moyens juridiques disponibles. La consultation du dossier en mairie et les plans (DP10, balcon) vous permettront d'identifier d'éventuelles irrégularités.

Une fois les travaux terminés, votre voisin devra déposer une déclaration d'achèvement des travaux (CERFA 13408). C'est l'occasion de vérifier la conformité de la construction réalisée avec ce qui a été autorisé.


Sources : Legifrance (Code de la santé publique, Code de l'urbanisme, Code civil), Service-public.fr