Régularisation rétroactive : comment légaliser des travaux non autorisés
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Vous avez réalisé des travaux sans permis ou découvert qu'une partie de votre maison n'a jamais été déclarée ? La régularisation permet de mettre en conformité ces constructions — à condition qu'elles respectent les règles d'urbanisme actuelles. Mais attention : toutes les infractions ne sont pas régularisables, et les sanctions peuvent être lourdes. Voici comment régulariser des travaux et les conditions à remplir pour obtenir un permis de régularisation.
Sommaire
- Qu'est-ce que la régularisation rétroactive ?
- Conditions pour régulariser une construction
- Procédure de régularisation
- Les délais de prescription
- Cas pratiques et exemples
- Erreurs à éviter
- Questions fréquentes
- Conclusion
Qu'est-ce que la régularisation rétroactive ?
La régularisation travaux sans permis consiste à demander une autorisation d'urbanisme pour des travaux déjà réalisés. Cette démarche vise à mettre en conformité administrative une construction qui a été édifiée sans autorisation ou en non-respect du permis obtenu.
Cadre juridique
Le Code de l'urbanisme ne prévoit pas expressément de « permis de régularisation ». En réalité, vous déposez une demande classique (permis de construire ou déclaration préalable) en mentionnant qu'il s'agit d'une régularisation. L'instructeur examine si les travaux réalisés sont conformes au PLU en vigueur.
Ce que permet la régularisation
- Obtenir un titre d'urbanisme pour des travaux non déclarés
- Éviter la démolition ordonnée par le tribunal
- Régulariser la situation en vue d'une vente
- Mettre fin aux poursuites administratives
Ce que ne permet PAS la régularisation
- Effacer l'infraction pénale (les amendes restent dues)
- Légaliser une construction non conforme au PLU actuel
- Annuler les recours des tiers déjà engagés
- Obtenir automatiquement le certificat de conformité
Conditions pour régulariser une construction
Condition n°1 : Conformité au PLU actuel
C'est la condition essentielle. Les travaux réalisés doivent respecter les règles d'urbanisme actuellement en vigueur, pas celles qui s'appliquaient au moment de la construction.
Critères vérifiés :
- Implantation par rapport aux limites (recul, retrait)
- Hauteur maximale
- Emprise au sol
- Aspect extérieur (matériaux, couleurs)
- Destination du bâtiment
Si les travaux ne sont pas conformes, la régularisation est impossible en l'état. Il faut alors modifier la construction pour la rendre conforme, ou solliciter une dérogation si le PLU le permet.
Condition n°2 : Absence de prescription
Même si la régularisation est possible, les sanctions pénales peuvent être évitées si le délai de prescription est dépassé :
| Type de prescription | Délai |
|---|---|
| Prescription pénale | 6 ans |
| Prescription civile | 10 ans |
Passé le délai de 10 ans, la construction devient quasi intouchable. Le détail de ces délais est expliqué dans notre article sur la prescription 10 ans.
Condition n°3 : Pas de recours en cours
Si un voisin a engagé un recours contre la construction illégale, la régularisation ne peut pas annuler la procédure judiciaire en cours.
Procédure de régularisation
Étape 1 : Identifier l'autorisation nécessaire
Selon l'ampleur des travaux à régulariser :
| Travaux | Autorisation |
|---|---|
| Surface 5-20 m² (ou 40 m² en zone U) | Déclaration préalable |
| Surface > 20 m² (ou > 40 m² en zone U) | Permis de construire |
| Modification façade sans surface | Déclaration préalable |
| Changement de destination | DP ou PC selon travaux |
Étape 2 : Constituer le dossier
Le dossier de régularisation comprend les mêmes pièces qu'une demande classique :
- CERFA 13406 pour un PC maison individuelle
- CERFA 13409 pour un PC autre bâtiment
- CERFA 13703 pour une déclaration préalable
- Plans de masse, plans de façade, photographies
- Notice décrivant le projet (ici : l'existant à régulariser)
La cotation du plan de masse doit refléter la situation réelle construite, pas le projet initial.
Mention obligatoire : Indiquez clairement sur le CERFA et dans la notice qu'il s'agit d'une « demande à titre de régularisation ».
Étape 3 : Déposer en mairie
Le dossier est déposé en mairie comme une demande classique. Les délais d'instruction sont identiques :
- 1 mois pour une DP (2 mois en zone ABF)
- 2 mois pour un PC maison (3 mois en zone ABF)
Étape 4 : Obtenir la décision
Trois issues possibles :
| Décision | Conséquence |
|---|---|
| Autorisation accordée | Construction régularisée |
| Autorisation avec prescriptions | Travaux complémentaires à réaliser |
| Refus | Mise en conformité ou démolition requise |
Étape 5 : Déclarer l'achèvement
Après régularisation, déposez une DAACT (déclaration d'achèvement) pour clôturer administrativement le dossier. La mairie peut effectuer une visite de contrôle.
Pour les ouvertures de chantier déjà passées, le CERFA de déclaration de chantier n'est plus nécessaire puisque les travaux sont terminés.
Les délais de prescription
Prescription pénale : 6 ans
L'infraction d'urbanisme (construction sans autorisation) est un délit prescrit au bout de 6 ans à compter de l'achèvement des travaux. Passé ce délai, aucune poursuite pénale ne peut être engagée, mais :
- La construction reste irrégulière administrativement
- Un refus de permis pour une extension peut être prononcé
- La vente peut être compromise
Prescription civile : 10 ans
Après 10 ans, la commune ne peut plus exiger la démolition. La construction devient « consolidée » même sans autorisation. Cette règle issue de la jurisprudence offre une sécurité aux propriétaires.
Attention : cette prescription ne joue que si aucune action n'a été engagée pendant 10 ans. Un procès-verbal interrompt la prescription.
Pour comprendre tous les enjeux, consultez notre article dédié à la procédure de régularisation et aux coûts et amendes.
Cas pratiques et exemples
Cas n°1 : Extension non déclarée de 25 m²
Situation : Propriétaire ayant construit une véranda de 25 m² sans autorisation il y a 4 ans. Souhaite vendre sa maison.
Analyse :
- Prescription pénale : non atteinte (< 6 ans)
- Zone UB du PLU : extension < 40 m² = DP possible
- Vérification conformité : implantation, matériaux, emprise
Procédure :
- Dépôt d'une déclaration préalable « à titre de régularisation »
- Délai : 1 mois
- Si conforme au PLU : DP accordée
- Dépôt DAACT pour clôturer
Résultat : Régularisation obtenue, vente possible.
Cas n°2 : Garage transformé en studio
Situation : Garage de 40 m² transformé en studio locatif sans autorisation. Le locataire signale l'absence de permis.
Analyse :
- Changement de destination (garage → habitation)
- Surface > 20 m² avec modification structure = PC requis
- Règles de sécurité et habitabilité à vérifier
Problème : Le PLU impose 2 places de stationnement par logement. La transformation a supprimé le garage sans créer de stationnement.
Solution :
- Créer 2 places de stationnement sur la parcelle
- Déposer PC de régularisation
- Prévoir mise aux normes électrique et ventilation
Risque : Si stationnement impossible, régularisation refusée → remise en état du garage.
Cas n°3 : Maison construite sans permis depuis 15 ans
Situation : Maison de 120 m² construite en 2008 sans aucune autorisation, découverte lors d'une succession.
Analyse :
- Prescription pénale : acquise (> 6 ans)
- Prescription civile : acquise (> 10 ans)
- Aucune démolition possible
Recommandation :
- Déposer une demande de régularisation pour « purger » le dossier
- Vérifier conformité au PLU actuel
- Si conforme : obtenir le titre d'urbanisme
- Si non conforme : la prescription protège, mais les extensions futures seront refusées
Point d'attention : Un avocat en urbanisme peut sécuriser la démarche.
Erreurs à éviter
Erreur n°1 : Croire que la prescription efface tout
La prescription pénale (6 ans) empêche les poursuites. La prescription civile (10 ans) empêche la démolition. Mais la construction reste administrativement irrégulière : pas de certificat de conformité, difficultés pour les travaux futurs, problèmes lors de la vente.
Erreur n°2 : Régulariser avant de vérifier la conformité
Si votre construction ne respecte pas le PLU actuel, la demande de régularisation sera refusée et vous aurez officiellement signalé l'infraction. Consultez d'abord les règles applicables.
Erreur n°3 : Omettre de mentionner la régularisation
Un dossier présenté comme projet neuf alors qu'il s'agit d'une régularisation constitue une fraude. Mentionnez toujours « demande à titre de régularisation ».
Erreur n°4 : Ignorer les recours des voisins
Un voisin peut contester la régularisation pendant 2 mois après affichage. Si la construction lui cause un préjudice (vue, ensoleillement), il peut obtenir des dommages-intérêts même après régularisation.
Erreur n°5 : Oublier la taxe d'aménagement
La régularisation génère une taxe d'aménagement sur la surface créée, même a posteriori. Prévoyez ce coût.
Erreur n°6 : Ne pas régulariser avant une vente
Le notaire vérifie les autorisations d'urbanisme. Une construction non régularisée peut bloquer la vente ou justifier une décote importante.
Questions fréquentes
Comment régulariser des travaux sans permis ?
Pour régulariser des travaux sans permis, déposez une demande d'autorisation (PC ou DP) en mentionnant « à titre de régularisation ». Le dossier doit présenter la situation réelle construite. Si les travaux sont conformes au PLU actuel, l'autorisation sera délivrée. Sinon, vous devrez modifier la construction ou, dans certains cas, démolir. Les délais d'instruction sont identiques aux demandes classiques.
Quel délai pour régulariser des travaux sans autorisation ?
Il n'y a pas de délai limite pour régulariser une construction tant que le PLU le permet. Cependant, agir avant la prescription pénale (6 ans) expose à des amendes. Après 10 ans, la démolition ne peut plus être ordonnée, mais la régularisation reste recommandée pour sécuriser le bien. Plus tôt vous régularisez, plus simple sera la procédure.
Peut-on régulariser une construction illégale ?
Une construction illégale peut être régularisée si elle est conforme au PLU actuel. Si les règles ont changé depuis la construction (hauteur, implantation, destination), la régularisation travaux sans permis sera refusée. Dans ce cas, des travaux de mise en conformité peuvent être nécessaires, ou la démolition si la prescription n'est pas acquise.
Quelle est la prescription pour travaux sans permis ?
La prescription travaux sans permis est de 6 ans pour les poursuites pénales et 10 ans pour la démolition. Ces délais courent à compter de l'achèvement des travaux. Après 6 ans, plus d'amende possible. Après 10 ans, plus de démolition possible. Mais la construction reste irrégulière sans permis régularisation.
Quelle amende pour travaux sans autorisation ?
L'amende travaux sans autorisation peut atteindre 6 000 € par m² de surface irrégulière (article L480-4 du Code de l'urbanisme). En cas de récidive ou de mauvaise foi, l'amende peut être doublée. S'ajoutent les frais de remise en état si ordonnée, et une astreinte journalière en cas de non-exécution. Ces sanctions sont applicables pendant 6 ans après l'achèvement.
Peut-on vendre une maison avec travaux non déclarés ?
Vendre maison travaux non déclarés est risqué. Le notaire vérifie la conformité et peut signaler l'anomalie. L'acheteur peut négocier une décote ou exiger la régularisation avant signature. En cas de vice caché, vous restez responsable. La meilleure solution : régulariser travaux avant la mise en vente pour sécuriser la transaction et éviter les litiges.
Comment savoir si ma maison est régularisable ?
Consultez le PLU de votre commune pour vérifier si votre construction respecte les règles actuelles : hauteur, implantation, emprise au sol, destination. Comparez avec votre situation réelle. Si tout est conforme, la régularisation est possible. En cas de doute, demandez un certificat d'urbanisme ou consultez le service urbanisme. Un Cerfa 13409 ou 13406 sera nécessaire selon la surface.
Conclusion
La régularisation rétroactive permet de légaliser des travaux sans autorisation régulariser — à condition qu'ils respectent le PLU actuel. Pour réussir votre démarche :
- Vérifiez la conformité au PLU avant de déposer
- Constituez un dossier complet reflétant la réalité construite
- Mentionnez clairement qu'il s'agit d'une régularisation
- Anticipez la taxe d'aménagement et les éventuelles prescriptions
La procédure de régularisation suit les mêmes règles qu'une demande classique. En cas de complexité (secteur ABF, monuments historiques, recours en cours), faites-vous accompagner par un professionnel.
Sources : Code de l'urbanisme (articles L480-4, L480-13, L421-1 et suivants), Jurisprudence Conseil d'État, Service-public.fr
