Modèle de Mise en Demeure pour Travaux Illégaux : Signaler une Construction Non Autorisée
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Votre voisin construit une extension sans permis. Un abri de jardin de 25 m² est apparu du jour au lendemain. Une surélévation modifie la vue depuis votre terrasse – sans qu'aucun panneau d'affichage n'ait été visible. Ces travaux illégaux peuvent être signalés à la mairie, qui a le pouvoir d'exiger leur régularisation ou leur démolition.
La mise en demeure de la mairie est l'acte administratif qui met le contrevenant face à ses obligations. Mais avant que la mairie n'agisse, vous pouvez vous-même lui signaler l'infraction. Voici le modèle de lettre, la procédure complète et les suites possibles pour mettre en conformité une construction irrégulière.
Sommaire
- Qu'est-ce qu'une construction illégale ?
- Procédure de signalement à la mairie
- Cas pratiques et exemples
- Erreurs à éviter
- Questions fréquentes
- Conclusion
Qu'est-ce qu'une Construction Illégale ?
Les différentes infractions d'urbanisme
Une construction est illégale dans plusieurs cas :
| Type d'infraction | Description | Sanction maximale |
|---|---|---|
| Construction sans autorisation | Travaux sans permis ni déclaration préalable | 6 000€/m² |
| Non-conformité au permis | Construction différente de l'autorisation | 6 000€/m² |
| Non-respect des prescriptions | Ignorer les conditions imposées | 6 000€/m² |
| Travaux après péremption | Permis expiré avant achèvement | 6 000€/m² |
L'article L480-4 du Code de l'urbanisme prévoit ces sanctions pénales. La prescription est de 6 ans pour les poursuites pénales, 10 ans pour l'action civile en démolition.
Les seuils qui déclenchent l'obligation d'autorisation
Pour rappel, les travaux de mise aux normes en urbanisme suivent ces seuils :
- < 5 m² : aucune formalité (sauf secteur protégé)
- 5-20 m² : déclaration préalable
- > 20 m² (ou > 40 m² en zone U avec PLU) : permis de construire
- > 150 m² total : architecte obligatoire
Une construction de 22 m² sans autorisation est donc une infraction caractérisée. Le plan de masse et le plan de façade auraient dû être déposés avec un CERFA.
Le rôle de la mairie
La mairie a l'obligation de faire cesser les infractions d'urbanisme sur son territoire. Le maire peut :
- Dresser un procès-verbal d'infraction par un agent assermenté
- Mettre en demeure le contrevenant de régulariser ou démolir
- Transmettre au procureur pour poursuites pénales
- Saisir le tribunal administratif pour obtenir une astreinte
Votre signalement déclenche cette chaîne d'actions. La mairie ne peut pas ignorer une infraction portée à sa connaissance.
Procédure de Signalement à la Mairie
Étape 1 : Documenter l'infraction
Avant de signaler, constituez votre dossier :
- Photos de la construction litigieuse (datées)
- Comparaison avec l'état antérieur (photos satellites, Google Street View)
- Vérification en mairie : demandez à consulter le registre des autorisations pour ce terrain
- Mesures si possible (hauteur, surface approximative)
Ces éléments aideront la mairie à apprécier la gravité de l'infraction.
Étape 2 : Rédiger le signalement
Adressez une lettre au maire de la commune où se situe la construction :
[Vos nom et prénom]
[Votre adresse]
M. le Maire de [commune]
Mairie de [commune]
[Adresse]
[Lieu], le [date]
Objet : Signalement d'une construction sans autorisation – [adresse du terrain concerné]
Lettre recommandée avec accusé de réception
Monsieur le Maire,
Je me permets d'attirer votre attention sur des travaux réalisés sur le terrain situé [adresse ou références cadastrales], propriété de [nom du propriétaire si connu].
Depuis le [date approximative], j'ai constaté [description des travaux : construction d'une extension d'environ XX m², édification d'un abri de jardin, surélévation d'un étage…]. À ma connaissance, aucun panneau d'affichage de permis de construire ou de déclaration préalable n'a été visible sur le terrain.
J'ai vérifié auprès de vos services qu'aucune autorisation d'urbanisme n'a été délivrée pour ces travaux [ou : ces travaux semblent non conformes au permis n° XXX délivré le XX/XX/XXXX].
Ces travaux, réalisés sans autorisation, constituent une infraction au Code de l'urbanisme (article L480-4). En tant que riverain directement affecté [ou : en tant que contribuable de la commune], je vous demande de bien vouloir :
- Faire constater l'infraction par un agent assermenté
- Mettre en demeure le propriétaire de [régulariser ses travaux / procéder à la démolition]
- M'informer des suites données à ce signalement
Je vous prie d'agréer, Monsieur le Maire, l'expression de ma considération distinguée.
[Signature]
PJ : Photographies des travaux
Étape 3 : L'envoi et le suivi
- Envoyez en recommandé avec AR pour garder une preuve
- Conservez une copie de la lettre et des pièces jointes
- Notez le numéro de suivi et la date de réception
La mairie a l'obligation de répondre dans un délai raisonnable. Si elle reste inactive, vous pouvez relancer, puis saisir le préfet (recours hiérarchique) ou le tribunal administratif pour carence.
Étape 4 : Les suites possibles
| Action de la mairie | Conséquence pour le contrevenant |
|---|---|
| Constat d'infraction | PV transmis au procureur |
| Mise en demeure | Délai pour régulariser (1-6 mois) |
| Astreinte | Pénalité journalière jusqu'à mise en conformité |
| Transmission au tribunal | Poursuites pénales + démolition possible |
Le coût des amendes peut atteindre plusieurs dizaines de milliers d'euros pour une extension non autorisée.
Cas Pratiques et Exemples
Cas n°1 : L'extension non déclarée
Situation : M. Durand constate que son voisin a construit une extension de 35 m² contre sa limite séparative, sans affichage de permis. La distance à la limite est de 2 m au lieu des 4 m imposés par le PLU.
Signalement : lettre au maire avec photos comparatives (avant/après grâce à Google Street View historique).
Suite : la mairie a constaté l'infraction et mis en demeure le voisin de régulariser son extension. Le voisin a dû déposer un permis de construire a posteriori, qui a été refusé car non conforme au prospect. Démolition partielle ordonnée (retrait de 2 m).
Coût pour le voisin : 15 000€ de démolition + 8 000€ d'amende pénale.
Cas n°2 : La surélévation sans architecte
Situation : un propriétaire a fait construire un étage supplémentaire sur sa maison, portant la surface totale de 130 m² à 185 m². Le permis aurait dû être signé par un architecte (seuil de 150 m² dépassé).
Signalement : le voisin, qui a perdu sa vue, signale l'infraction. Le plan de masse coté du dossier initial ne prévoyait pas de surélévation.
Suite : la mairie exige la procédure de régularisation complète avec intervention d'un architecte. Le permis de régularisation est accordé mais le voisin a pu exercer un recours contre celui-ci.
Cas n°3 : L'abri de jardin en zone ABF
Situation : un abri de jardin de 18 m² a été installé dans le périmètre d'un monument historique, sans déclaration préalable ni avis de l'ABF.
Particularité : en zone protégée, même une construction de 5 m² nécessite une autorisation. L'absence de déclaration est une infraction aggravée.
Suite : démolition ordonnée par le tribunal. L'abri, non régularisable (refus prévisible de l'ABF pour raisons esthétiques), a dû être retiré. Amende de 3 500€.
Erreurs à Éviter
1. Signaler sans avoir vérifié l'existence d'une autorisation
Avant de signaler, consultez le registre des permis en mairie. Une construction peut sembler illégale alors qu'un permis existe – simplement le panneau a été retiré. Vérifier évite de passer pour un délateur infondé.
2. Confondre signalement et recours contre un permis
Le signalement vise les travaux sans autorisation. Si le voisin a un permis que vous contestez, c'est un recours gracieux ou contentieux qu'il faut engager, avec notification au bénéficiaire. Les délais et procédures sont différents.
3. Signaler de manière anonyme
Un signalement anonyme sera traité avec moins de diligence. Identifiez-vous : la mairie prend plus au sérieux un riverain nommé qu'une lettre non signée. De plus, vous serez tenu informé des suites.
4. Attendre la fin des travaux pour signaler
Plus tôt vous signalez, plus la mairie peut intervenir efficacement. Un chantier en cours peut être interrompu. Une construction achevée depuis des années rend les poursuites plus complexes (prescription partielle possible).
5. Penser que la mairie agira d'office
La mairie n'a pas les moyens de surveiller tous les chantiers. Votre signalement est souvent le déclencheur de l'action administrative. Sans signalement, l'infraction peut passer inaperçue pendant des années.
Questions Fréquentes
Comment mettre en conformité une construction illégale ?
Pour régulariser des travaux sans autorisation, deux options : déposer une demande de permis de construire ou de déclaration préalable a posteriori (si les travaux respectent les règles d'urbanisme actuelles), ou procéder à des travaux de mise en conformité physique (démolition partielle, modification). La régularisation n'est possible que si le projet est conforme au PLU actuel. Utilisez les exemples de plan de masse pour préparer votre dossier.
Quel délai pour la mise en conformité après mise en demeure ?
Le délai est fixé par la mise en demeure de la mairie, généralement entre 1 et 6 mois selon la complexité des travaux à corriger. Pour une simple démolition d'un petit abri, 1 mois peut suffire. Pour une régularisation nécessitant un nouveau permis, 3 à 6 mois sont souvent accordés. Le non-respect du délai peut entraîner une astreinte journalière (jusqu'à 500€/jour) ou la démolition d'office.
Mise en conformité ou permis modificatif ?
Le permis modificatif s'applique aux modifications mineures d'un projet autorisé. La mise en conformité concerne les travaux réalisés sans autorisation ou en infraction caractérisée. Si vous avez un permis mais avez construit différemment (hauteur, surface, implantation), un permis modificatif peut suffire. Si vous n'avez jamais eu d'autorisation, c'est un permis de régularisation qu'il faut demander – avec le risque d'un refus si le projet viole le PLU.
Combien coûte une mise en conformité en urbanisme ?
Le coût dépend de la nature de la régularisation. Comptez : les frais de dossier (CERFA gratuit, mais plan de masse par géomètre : 500-1500€), les honoraires d'architecte si nécessaire (1000-3000€ pour une régularisation), les éventuels travaux correctifs, et l'amende pénale (jusqu'à 6000€/m² dans les cas graves). Un géomètre pour le plan de masse est souvent indispensable pour les régularisations complexes.
La mairie peut-elle contrôler les travaux après la DAACT ?
Oui. Après le dépôt de la DAACT (Déclaration Attestant l'Achèvement et la Conformité des Travaux), la mairie dispose de 3 mois (5 mois en zone protégée) pour effectuer une visite de conformité. Si la mairie constate des non-conformités, elle peut exiger la mise en conformité ou contester la DAACT. Passé ce délai sans contestation, l'attestation de conformité peut être demandée. Un logiciel de plan de masse gratuit peut vous aider à vérifier vous-même la conformité avant le contrôle.
Conclusion
Le signalement d'une construction illégale à la mairie est un droit – et souvent un devoir de bon voisinage. Une extension sauvage qui dévalorise votre bien, un abri qui empiète sur la limite, une surélévation qui vous prive de lumière : ces situations méritent une réponse administrative.
Le modèle de lettre fourni vous permet d'enclencher la procédure sans avocat. La mairie a l'obligation de constater l'infraction et d'agir. Si elle reste inactive, le préfet puis le tribunal administratif peuvent être saisis pour carence.
Pour le contrevenant, la régularisation reste souvent possible si les travaux sont conformes au PLU actuel. Le plan de masse pour permis de construire et la différence entre plan de masse et plan de situation doivent être maîtrisés pour constituer un dossier de régularisation solide. Mieux vaut anticiper que subir une démolition ordonnée par le tribunal.
Sources : Code de l'urbanisme (L480-1 à L480-14, R462-9), Conseil d'État, Service-public.fr
