Fermer son Balcon en Copropriété : Réglementation et Démarches
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Transformer un balcon ou une loggia en véranda vitrée pour gagner quelques mètres carrés de surface habitable : l'idée séduit de nombreux copropriétaires. Mais entre l'accord de la copropriété, les règles d'urbanisme et les contraintes techniques, le parcours peut vite se transformer en casse-tête. En copropriété, fermer un balcon ne se décide pas seul. L'aspect extérieur de l'immeuble appartient aux parties communes, et toute modification nécessite un vote en assemblée générale. Côté urbanisme, la création de surface close implique des formalités spécifiques. Voici la marche à suivre pour mener votre projet dans les règles.
Sommaire
- Fermer un balcon : ce que dit le droit
- Les démarches à accomplir
- Cas pratiques et exemples concrets
- Les erreurs à éviter
- Questions fréquentes
- Conclusion
Fermer un balcon : ce que dit le droit
La double autorisation obligatoire
Fermer un balcon ou une loggia en copropriété nécessite deux autorisations distinctes :
- L'autorisation de la copropriété : vote en assemblée générale à la majorité de l'article 25 (majorité des voix de tous les copropriétaires)
- L'autorisation d'urbanisme : déclaration préalable ou permis de construire selon la surface créée
Ces deux procédures sont indépendantes mais complémentaires. Obtenir l'accord de la copropriété ne dispense pas des formalités d'urbanisme, et inversement.
Pourquoi l'accord de la copropriété est-il nécessaire ?
Le règlement de copropriété distingue les parties privatives (votre appartement) des parties communes (façades, structure, toiture). Un balcon a généralement un statut mixte :
- Le sol (dalle) est partie commune
- La jouissance est privative (vous seul l'utilisez)
- Les garde-corps et l'aspect extérieur sont parties communes
La fermeture d'un balcon modifie l'aspect extérieur de l'immeuble, qui constitue une partie commune. C'est pourquoi le vote de l'assemblée générale est obligatoire, même si vous êtes le seul à utiliser ce balcon.
Les règles d'urbanisme applicables
La fermeture d'un balcon crée de la surface de plancher puisque l'espace devient clos et couvert. Cette création de surface soumet le projet aux règles du Code de l'urbanisme (articles R421-9 à R421-17).
Les seuils applicables :
| Surface créée | Autorisation requise |
|---|---|
| Moins de 5 m² | Déclaration préalable (modification façade) |
| 5 à 20 m² | Déclaration préalable |
| 20 à 40 m² (zone U avec PLU) | Déclaration préalable |
| Plus de 40 m² (zone U) | Permis de construire |
| Plus de 20 m² (hors zone U) | Permis de construire |
Même si la surface créée est inférieure à 5 m², une déclaration préalable reste obligatoire car le projet modifie l'aspect extérieur du bâtiment. Vous pouvez utiliser le CERFA 13703 (ou ses versions actualisées 16702/16703) pour constituer votre dossier.
L'impact sur les surfaces existantes
La fermeture d'un balcon transforme un espace ouvert en espace clos. Cette transformation a plusieurs conséquences :
- Création de surface de plancher : l'espace compte désormais dans le calcul des surfaces
- Augmentation de l'emprise au sol : si le balcon était en saillie, il s'ajoute à l'emprise existante
- Modification de la hauteur réglementaire : selon le type de vitrage, la hauteur peut être comptabilisée différemment
Pour une extension de 20m², les mêmes principes s'appliquent : c'est la surface totale après travaux qui détermine le régime d'autorisation.
Les démarches à accomplir
Étape 1 : Vérifier le règlement de copropriété
Avant tout, consultez le règlement de copropriété. Certains interdisent expressément la fermeture des balcons pour préserver l'harmonie de la façade. D'autres encadrent les travaux autorisés (type de vitrage, couleur des menuiseries, dimensions).
Si le règlement interdit la fermeture, vous devrez d'abord faire voter une modification du règlement (majorité des deux tiers, article 26). Cette démarche préalable ajoute plusieurs mois au calendrier du projet.
Étape 2 : Préparer le dossier pour l'AG
Pour soumettre votre projet à l'assemblée générale, vous devez transmettre au syndic un dossier complet comprenant :
- Une description détaillée du projet
- Les plans avant/après
- Le devis des travaux
- Les caractéristiques techniques (matériaux, couleurs)
- Un visuel de l'aspect extérieur après travaux
Le syndic inscrit la résolution à l'ordre du jour de la prochaine AG. Comptez 2 à 3 mois entre l'envoi du dossier et la tenue de l'assemblée.
Étape 3 : Le vote en assemblée générale
La fermeture d'un balcon affecte les parties communes (aspect extérieur). Elle nécessite un vote à la majorité de l'article 25 : la majorité des voix de tous les copropriétaires, présents ou non.
Si la majorité n'est pas atteinte mais que le projet recueille au moins un tiers des voix, un second vote peut intervenir à la majorité simple (article 25-1). Cette passerelle facilite l'adoption des projets qui ne font pas l'unanimité.
Conseil pratique : présentez votre projet aux autres copropriétaires avant l'AG. Un voisin informé sera plus enclin à voter favorablement qu'un copropriétaire découvrant le projet le jour du vote.
Étape 4 : Déposer l'autorisation d'urbanisme
Une fois l'accord de la copropriété obtenu, vous pouvez déposer votre dossier en mairie. Pour une déclaration préalable, le dossier comprend :
- Le formulaire CERFA complété
- Un plan de masse indiquant la situation du balcon
- Un plan en coupe du balcon avant/après
- Les plans des façades avant/après (DP4)
- Une représentation de l'aspect extérieur après travaux (DP5)
- Un document d'insertion montrant l'intégration du projet (DP6)
- Des photographies de l'environnement (DP7-DP8)
Le délai d'instruction est d'1 mois pour une déclaration préalable simple, 2 mois si le terrain se situe en secteur ABF.
Étape 5 : Attendre la non-opposition
La mairie dispose d'un mois pour s'opposer à votre projet. Sans réponse dans ce délai, vous bénéficiez d'une non-opposition tacite. Demandez un certificat de non-opposition pour sécuriser votre situation.
Si la mairie refuse, elle doit motiver sa décision. Vous pouvez alors modifier votre projet et redéposer, ou contester la décision par recours gracieux puis contentieux.
Étape 6 : Réaliser les travaux et afficher
Avant de commencer les travaux, affichez le panneau réglementaire sur votre balcon (visible depuis la voie publique). Cet affichage déclenche le délai de recours des tiers de 2 mois.
Les travaux doivent être conformes au projet autorisé. Toute modification substantielle nécessite une nouvelle demande.
Cas pratiques et exemples concrets
Exemple 1 : Loggia de 8 m² en zone urbaine
Madame Rousseau possède un appartement avec une loggia de 8 m² dans un immeuble des années 1970. Elle souhaite la fermer avec des baies vitrées coulissantes.
Démarche copropriété :
- Dossier transmis au syndic en janvier
- AG prévue en mars
- Vote favorable à la majorité de l'article 25
Démarche urbanisme :
- Dépôt de la déclaration préalable en avril
- Non-opposition obtenue en mai (1 mois)
- Affichage et travaux en juin-juillet
Coût total :
- Fermeture vitrage aluminium : 4 500 €
- Honoraires architecte (plans) : 350 €
- Taxe d'aménagement : 320 € (8 m² × 40 €)
Le projet a pris 7 mois du premier dossier à l'achèvement des travaux.
Exemple 2 : Balcon en zone ABF
Monsieur Leroy habite un immeuble haussmannien à 200 m d'un monument classé. Son balcon filant de 4 m² donne sur la rue principale.
Particularités :
- Zone ABF : avis de l'Architecte des Bâtiments de France obligatoire
- Façade ordonnancée : contraintes esthétiques fortes
- Règlement de copropriété : prescrit des menuiseries bois peintes en gris
Résultat :
L'ABF a refusé le projet initial (vitrage moderne incompatible avec le caractère de l'immeuble). Après modification (menuiseries bois traditionnelles, vitrage à petits carreaux), le projet a été accepté.
Délai total : 11 mois (dont 4 mois de négociation avec l'ABF).
Surcoût : +3 000 € pour les menuiseries conformes aux exigences patrimoniales.
Exemple 3 : Fermeture collective
Dans un immeuble des années 1980, plusieurs copropriétaires souhaitent fermer leur balcon. Le syndic propose un projet collectif.
Avantages :
- Harmonie préservée (même modèle pour tous)
- Économies d'échelle (devis groupé)
- Une seule décision en AG
- Un seul dossier d'urbanisme
Organisation :
- L'ensemble des copropriétaires intéressés (8 sur 20) participent au financement
- Le syndic coordonne le projet
- Les travaux sont réalisés en une seule campagne
Cette approche collective simplifie les démarches et garantit une cohérence esthétique que les mairies et ABF apprécient généralement.
Les erreurs à éviter
Erreur n°1 : Commencer les travaux avant le vote en AG
Certains copropriétaires, impatients, font poser leurs vitrages avant d'avoir obtenu l'accord de l'assemblée générale. C'est une erreur grave :
- La copropriété peut exiger la remise en état à vos frais
- Vous risquez une amende pour atteinte aux parties communes
- L'assurance peut refuser de couvrir les dommages
- La revente de l'appartement sera compliquée
Le délai d'attente est frustrant, mais incompressible.
Erreur n°2 : Négliger l'autorisation d'urbanisme
L'accord de la copropriété ne vaut pas autorisation d'urbanisme. Ces deux autorisations sont indépendantes. Des travaux réalisés avec l'accord de la copropriété mais sans déclaration préalable constituent une infraction au Code de l'urbanisme, passible d'une amende jusqu'à 6 000 € par m².
La prescription est de 6 ans en matière pénale, 10 ans en matière civile. Un voisin peut exiger la remise en état pendant 10 ans.
Erreur n°3 : Ignorer les règles du PLU
Le Plan Local d'Urbanisme peut interdire la fermeture des balcons dans certains secteurs pour préserver l'aspect architectural. Même avec l'accord unanime de la copropriété, la mairie refusera si le PLU s'y oppose.
Avant d'engager des démarches en copropriété, vérifiez que le projet est réglementairement possible. Un rendez-vous au service urbanisme de la mairie peut éviter des mois de procédure inutile.
Erreur n°4 : Sous-estimer l'impact sur les surfaces
La fermeture d'un balcon crée de la surface de plancher. Si cette création porte la surface totale de votre propriété au-delà de 150 m², vous entrez dans le régime du permis de construire avec architecte obligatoire.
Exemple : un appartement de 145 m² avec un balcon de 8 m² fermé = 153 m² total = architecte obligatoire.
Erreur n°5 : Oublier l'affichage et les recours
Une fois l'autorisation obtenue, l'affichage sur le terrain est obligatoire. Le délai de recours des tiers (2 mois) court à partir du premier jour d'affichage continu. Sans affichage correct, ce délai ne démarre jamais et un voisin peut contester votre projet pendant des années.
Pour les projets sensibles, faites constater l'affichage par un huissier (3 constats recommandés : pose, milieu, fin).
Questions fréquentes
Faut-il une autorisation pour fermer une loggia ?
Oui, la fermeture d'une loggia nécessite une déclaration préalable car elle modifie l'aspect extérieur du bâtiment et crée de la surface de plancher. En copropriété, l'accord préalable de l'assemblée générale est également obligatoire. Le délai d'instruction est d'1 mois (2 mois en zone ABF).
Peut-on fermer une loggia sans permis ?
Non, il n'est pas possible de fermer une loggia sans autorisation d'urbanisme. La modification de l'aspect extérieur implique au minimum une déclaration préalable. Si la surface créée dépasse 40 m² en zone urbaine (ou 20 m² ailleurs), un permis de construire est nécessaire. Les sanctions pour travaux sans autorisation peuvent atteindre 6 000 € par m².
Quelle majorité pour fermer un balcon en copropriété ?
La fermeture d'un balcon affecte les parties communes (aspect extérieur) et nécessite un vote à la majorité de l'article 25 : la majorité des voix de tous les copropriétaires, présents ou non à l'assemblée générale. Si cette majorité n'est pas atteinte mais que le projet obtient au moins un tiers des voix, un second vote à la majorité simple est possible (article 25-1).
Hauteur maximale d’une clôture de balcon ?
La hauteur d'une fermeture de balcon n'est pas soumise aux mêmes règles qu'une clôture de terrain. Elle est généralement limitée par la hauteur sous plafond existante (environ 2,50 m). Le PLU peut toutefois imposer des contraintes sur l'aspect des menuiseries, les matériaux et les couleurs. En secteur protégé, l'ABF peut exiger des adaptations.
Peut-on mettre une clôture sur son balcon sans accord du voisin ?
En copropriété, ce n'est pas l'accord du voisin qui compte mais celui de l'assemblée générale. Même si votre voisin immédiat est favorable, le vote de l'ensemble des copropriétaires est nécessaire. Un pare-vue ou brise-vent léger peut parfois être installé sans autorisation s'il est démontable et ne modifie pas durablement l'aspect de la façade, mais cette tolérance varie selon les copropriétés.
Combien coûte la fermeture d’un balcon ?
Le coût varie selon la surface et les matériaux choisis. Comptez entre 500 € et 1 200 € par m² pour une fermeture vitrée standard en aluminium. Un balcon de 6 m² revient ainsi entre 3 000 € et 7 200 €. Ajoutez les honoraires pour les plans (200-500 €), la taxe d'aménagement (environ 40 €/m² selon les communes) et éventuellement les travaux d'isolation ou d'électricité.
Le vitrage d’un balcon est-il soumis à la RE2020 ?
Non, la fermeture d'un balcon existant n'est pas soumise à la RE2020 qui concerne les constructions neuves. En revanche, si vous réalisez simultanément d'autres travaux d'isolation thermique, la réglementation thermique par éléments peut s'appliquer (performances minimales des vitrages). Une extension de plus de 50 m² chauffée serait soumise à la réglementation thermique en vigueur.
Conclusion
Fermer un balcon ou une loggia en copropriété reste un projet accessible, à condition de respecter la double procédure : vote en assemblée générale et autorisation d'urbanisme.
La clé du succès réside dans la préparation : consultez le règlement de copropriété, vérifiez le PLU, et constituez un dossier complet avant de solliciter le vote des copropriétaires. En secteur protégé, anticipez les délais supplémentaires liés à l'avis de l'ABF.
Pour des projets connexes comme l'installation d'un portail ou la création d'une terrasse avec pergola, les mêmes réflexes s'appliquent : anticiper, documenter, déposer. Un bow-window ou une véranda suivent une logique similaire en termes de surfaces et d'autorisations.
Avec une bonne organisation, votre balcon fermé pourra être opérationnel en 6 à 12 mois selon les spécificités de votre situation.
Sources : Code de l'urbanisme (articles R421-9 à R421-17), Loi du 10 juillet 1965 sur la copropriété, Service-public.fr
