Autorisation de Terrasse sur Domaine Public : Procédure Complète
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Installer une terrasse de restaurant ou de café sur le trottoir représente un atout commercial majeur, surtout aux beaux jours. Mais le trottoir appartient au domaine public : vous ne pouvez pas y poser tables et chaises sans autorisation préalable de la mairie. Cette autorisation d'occupation temporaire (AOT) génère une redevance annuelle variable selon les communes (de 50 € à plus de 500 € par m² à Paris). Une terrasse installée sans autorisation expose l'exploitant à une amende de 1 500 € et à l'enlèvement immédiat du mobilier. Les règles diffèrent totalement de celles applicables aux terrasses privées : ici, pas de déclaration préalable d'urbanisme, mais une demande d'occupation du domaine public soumise à des contraintes de sécurité, d'accessibilité et d'esthétique. Voici la marche à suivre pour obtenir votre autorisation dans les règles.
Sommaire
- Qu'est-ce qu'une terrasse sur domaine public ?
- Les différents types d'autorisation
- Procédure de demande complète
- Tarifs et redevances par ville
- Règles d'installation à respecter
- Erreurs fréquentes à éviter
- Questions fréquentes
- Conclusion
Qu'est-ce qu'une terrasse sur domaine public ?
Une terrasse sur domaine public désigne l'occupation d'un espace public (trottoir, place, voie piétonne) par un établissement commercial pour y installer du mobilier extérieur à usage de sa clientèle. Cette occupation est régie par le Code général de la propriété des personnes publiques (articles L2122-1 et suivants), totalement distinct du Code de l'urbanisme qui encadre les terrasses privées.
Distinction avec les terrasses privées
La réglementation diffère radicalement selon que la terrasse se situe sur un terrain privé ou public :
Terrasse privée (sur votre propriété) :
- Soumise au Code de l'urbanisme
- Déclaration préalable ou permis selon la surface et la hauteur
- Une terrasse surélevée de plus de 60 cm nécessite une autorisation d'urbanisme
- La terrasse compte ou non dans l'emprise au sol selon sa configuration
Terrasse sur domaine public (trottoir, place) :
- Soumise au Code général de la propriété des personnes publiques
- Autorisation d'occupation temporaire (AOT) délivrée par la mairie
- Redevance annuelle obligatoire
- Pas de lien avec le PLU ni les autorisations d'urbanisme classiques
Cadre juridique de l'occupation
L'occupation du domaine public est par nature précaire et révocable. Le gestionnaire du domaine (généralement la commune pour les trottoirs) peut à tout moment :
- Modifier les conditions d'occupation
- Réduire la surface autorisée
- Retirer l'autorisation pour motif d'intérêt général
Cette précarité distingue fondamentalement l'AOT d'un permis de construire : vous n'acquérez aucun droit définitif sur l'espace occupé. La durée maximale est généralement d'un an, renouvelable.
Types d'établissements concernés
Peuvent demander une autorisation de terrasse sur domaine public :
- Restaurants et brasseries
- Cafés et bars
- Salons de thé
- Glaciers
- Commerces alimentaires avec consommation sur place
- Hôtels (pour leur espace restauration)
Les commerces non alimentaires (boutiques, services) peuvent obtenir des autorisations d'étalage mais pas de terrasse à proprement parler.
Les différents types d'autorisation
Selon l'ampleur de l'installation, plusieurs titres d'occupation existent.
Le permis de stationnement
Le permis de stationnement autorise l'installation de mobilier léger et mobile sur le trottoir, sans fixation au sol. Il concerne :
- Tables et chaises amovibles
- Parasols non scellés
- Jardinières déplaçables
- Barrières délimitant l'espace
Le mobilier doit pouvoir être rangé chaque soir à la fermeture. Le permis de stationnement est le titre le plus courant pour les petites terrasses.
Durée : généralement un an, à renouveler.
Avantage : procédure simplifiée et redevance modérée.
La permission de voirie
La permission de voirie autorise des aménagements plus permanents, impliquant une emprise physique sur le domaine public :
- Terrasses closes (parois vitrées)
- Planchers surélevés
- Structures fixées au sol
- Auvents ou stores ancrés
Ces installations modifient temporairement le domaine public et nécessitent souvent des travaux de remise en état à la fin de l'autorisation.
Durée : variable, souvent pluriannuelle.
Contrainte : le pétitionnaire doit garantir la remise en état du domaine à ses frais.
L'autorisation d'occupation temporaire (AOT) générique
Certaines communes délivrent une AOT unique regroupant les caractéristiques du permis de stationnement et de la permission de voirie. Cette simplification administrative est de plus en plus répandue.
Cas particulier : la terrasse chauffée ou fermée
L'installation de dispositifs de chauffage ou de parois fermant la terrasse est soumise à des règles supplémentaires :
-
Chauffage : depuis 2022, les terrasses chauffées en extérieur sont interdites (loi Climat et Résilience). Seules les terrasses fermées peuvent être chauffées.
-
Fermeture : une terrasse fermée sur au moins 3 côtés devient un local et peut nécessiter une autorisation d'urbanisme en plus de l'AOT. La terrasse couverte avec fermeture permanente relève alors du régime des constructions.
Procédure de demande complète
Étape 1 : Se renseigner sur le règlement local
Chaque commune dispose d'un règlement des terrasses et étalages définissant :
- Les zones où les terrasses sont autorisées
- Les dimensions maximales (profondeur, surface)
- Les horaires d'ouverture autorisés
- Les couleurs et matériaux du mobilier imposés
- Le cheminement piéton à préserver (1,40 m minimum)
Consultez ce règlement en mairie ou sur le site internet de la commune avant toute démarche.
Étape 2 : Constituer le dossier de demande
Le dossier comprend généralement :
Documents administratifs :
- Formulaire de demande d'AOT (propre à chaque commune)
- Copie de l'autorisation d'exploitation du commerce (licence restaurant ou débit de boissons)
- Extrait Kbis de moins de 3 mois
- Attestation d'assurance responsabilité civile couvrant l'occupation du domaine public
- Justificatif d'identité du demandeur
Documents techniques :
- Plan de masse de l'installation projetée avec cotations
- Plan de situation montrant l'implantation par rapport à la voirie
- Descriptif du mobilier (type, dimensions, couleurs)
- Photos de l'emplacement actuel
Pour les terrasses plus importantes, un plan de masse coté détaillant les distances par rapport aux obstacles (mobilier urbain, arbres, passages piétons) peut être exigé.
Étape 3 : Déposer la demande
Le dépôt du dossier s'effectue :
- En mairie (service voirie, commerce ou urbanisme selon les communes)
- Par voie dématérialisée sur les téléprocédures de la commune
Les délais de traitement varient de 15 jours à 2 mois selon les communes et la période de l'année. Déposez votre demande au moins 2 mois avant l'ouverture souhaitée de la terrasse.
Étape 4 : Instruction et décision
La mairie vérifie :
- La conformité au règlement des terrasses
- L'absence de gêne pour la circulation piétonne et véhicules
- Le respect des normes d'accessibilité (largeur de passage pour fauteuils roulants)
- L'harmonie avec l'environnement urbain
- L'avis des services concernés (police municipale, architecte des bâtiments de France en secteur protégé)
En secteur ABF, l'Architecte des Bâtiments de France émet un avis sur le mobilier et les dispositifs de couverture, tout comme pour une déclaration préalable en secteur protégé.
Étape 5 : Paiement de la redevance
L'autorisation est délivrée après paiement de la redevance d'occupation du domaine public. Cette redevance est calculée sur la surface occupée et la durée.
Tarifs et redevances par ville
Les redevances varient considérablement selon les communes. Voici des ordres de grandeur (tarifs 2024) :
Paris
Paris applique un barème complexe selon les arrondissements et les catégories de voies :
| Zone | Redevance annuelle par m² |
|---|---|
| Voies exceptionnelles (Champs-Élysées…) | 560 € à 680 € |
| 1ère catégorie | 260 € à 350 € |
| 2ème catégorie | 130 € à 200 € |
| 3ème catégorie | 70 € à 120 € |
Une terrasse de 20 m² sur les Champs-Élysées coûte ainsi jusqu'à 13 600 € par an en redevance.
Autres grandes villes
| Ville | Fourchette par m²/an |
|---|---|
| Lyon | 50 € à 250 € |
| Marseille | 30 € à 180 € |
| Bordeaux | 40 € à 200 € |
| Toulouse | 35 € à 150 € |
| Nantes | 30 € à 120 € |
| Nice | 60 € à 300 € |
Petites et moyennes communes
En zone rurale ou petite ville, la redevance peut descendre à 10 € à 30 € par m² et par an, voire être symbolique pour encourager l'animation commerciale.
Frais complémentaires
Au-delà de la redevance, prévoyez :
-
Droits de voirie : pour les permissions de voirie (travaux sur le domaine), un droit fixe de 100 € à 500 € peut s'ajouter.
-
Assurance : environ 200 € à 500 € par an selon la surface et les garanties.
-
Mobilier conforme : si la commune impose un modèle particulier, le surcoût peut atteindre 30 % par rapport à du mobilier standard.
Règles d'installation à respecter
Une fois l'autorisation obtenue, l'exploitation de la terrasse est soumise à des règles strictes.
Accessibilité et circulation
- Passage piéton : maintenir une bande de circulation de 1,40 m minimum (1,80 m recommandé) sur le trottoir.
- Accessibilité PMR : l'accès à la terrasse doit être praticable en fauteuil roulant (pas de ressaut > 2 cm, largeur de passage suffisante).
- Stationnement : ne pas empiéter sur les places de stationnement, notamment PMR.
- Entrées d'immeubles : dégager l'accès aux portes cochères et entrées d'habitation.
Dimensions et emprise
- Ne pas dépasser la largeur autorisée (souvent limitée à la façade du commerce).
- Respecter la profondeur maximale fixée par le règlement local.
- Ne pas installer de mobilier au-delà du périmètre autorisé.
Horaires
Les horaires d'exploitation sont encadrés :
- Installation du mobilier : généralement pas avant 7h ou 8h.
- Fin d'exploitation : souvent limitée à 22h ou 23h en semaine, parfois 00h le week-end.
- Rangement : le mobilier doit être rangé après la fermeture (sauf terrasse couverte permanente).
Le non-respect des horaires est verbalisé (amende de 150 € à 750 €).
Aspect et entretien
- Propreté : nettoyage quotidien de la terrasse et de son environnement immédiat.
- Mobilier conforme : respect des couleurs et modèles imposés par le règlement.
- Végétalisation : les bacs à plantes sont souvent encouragés mais doivent rester dans l'emprise autorisée.
- Éclairage : discret et non éblouissant pour les riverains.
Nuisances
- Pas de diffusion de musique amplifiée sur les terrasses ouvertes.
- Limitation des nuisances sonores (conversation des clients).
- Interdiction de fumer sous les terrasses couvertes (espaces clos).
Erreurs fréquentes à éviter
Erreur n°1 : Confondre autorisation d'urbanisme et AOT
Installer une terrasse sur le trottoir ne nécessite pas de déclaration préalable d'urbanisme classique ni de formulaire CERFA 13703. L'AOT suffit pour le domaine public. En revanche, si vous construisez une terrasse sur votre propriété privée, les règles d'urbanisme s'appliquent : une terrasse bois surélevée ou une terrasse avec pergola relève du Code de l'urbanisme.
Erreur n°2 : Dépasser la surface autorisée
Les contrôles de la police municipale ou des agents de voirie sont fréquents. Une terrasse débordant de 2 m² sur l'autorisation entraîne une mise en demeure et une majoration de redevance rétroactive, voire le retrait de l'autorisation.
Erreur n°3 : Négliger l'accessibilité
Obstruer le passage piéton ou l'accès PMR est sanctionné (amende de 1 500 €) et peut entraîner le retrait immédiat de l'autorisation. Un géomètre peut vous aider à implanter correctement votre terrasse si le trottoir est étroit.
Erreur n°4 : Installer du mobilier non conforme
En secteur sauvegardé ou centre historique, le mobilier doit respecter une charte (couleurs, matériaux, style). Des parasols rouges flashy sur une place classée seront refusés. Vérifiez les prescriptions avant tout achat.
Erreur n°5 : Oublier le renouvellement
L'autorisation est annuelle. Oublier de la renouveler expose à l'exploitation sans titre et aux sanctions associées. Notez la date d'échéance et relancez la demande 2 mois avant.
Erreur n°6 : Sous-estimer les coûts
La redevance représente un coût fixe récurrent. Une terrasse de 15 m² à 200 €/m² coûte 3 000 € par an, soit 250 € par mois. Intégrez ce poste dans votre business plan.
Questions fréquentes
Comment obtenir une autorisation de terrasse sur le trottoir ?
Pour installer une terrasse sur le trottoir, déposez une demande d'autorisation d'occupation temporaire (AOT) en mairie. Le dossier comprend le formulaire de demande, votre licence d'exploitation, un extrait Kbis, une attestation d'assurance et un plan d'implantation. La mairie vérifie la conformité au règlement local des terrasses et délivre l'autorisation après paiement de la redevance. Comptez 2 mois de délai entre le dépôt et l'obtention.
Combien coûte une terrasse sur le domaine public ?
Le coût dépend de la commune et de l'emplacement. À Paris, la redevance varie de 70 € à 680 € par m² et par an selon la catégorie de la voie. En province, comptez 30 € à 200 € par m² par an dans les grandes villes, et 10 € à 50 € dans les petites communes. Une terrasse de 20 m² représente donc un budget annuel de 200 € (petite commune) à 13 600 € (voie exceptionnelle à Paris). Ajoutez l'assurance (200 € à 500 €/an) et le mobilier conforme.
Peut-on chauffer une terrasse sur le trottoir ?
Depuis la loi Climat et Résilience de 2021, il est interdit de chauffer une terrasse ouverte sur l'espace public. Seules les terrasses entièrement closes (fermées sur au moins 3 côtés par des parois fixes) peuvent être équipées de chauffage. Cette interdiction vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Les contrevenants s'exposent à une amende de 1 500 € (3 000 € en récidive). Les braseros décoratifs sans fonction de chauffage restent tolérés dans certaines communes.
Quelle est la durée d’une autorisation de terrasse ?
L'autorisation d'occupation temporaire du domaine public est généralement délivrée pour un an, renouvelable sur demande. Certaines communes proposent des autorisations saisonnières (avril à octobre) moins coûteuses. L'autorisation est précaire et révocable : la mairie peut la retirer ou la modifier à tout moment pour motif d'intérêt général (travaux de voirie, manifestation, raison de sécurité). Le renouvellement n'est jamais automatique : anticipez la demande 2 mois avant l'échéance.
Quelles sont les sanctions en cas de terrasse non autorisée ?
L'exploitation d'une terrasse sans autorisation expose à une amende de 1 500 € (contravention de 5ème classe), au retrait immédiat du mobilier et à une mise en demeure de régulariser. En cas de récidive, l'amende peut atteindre 3 000 €. La mairie peut également facturer rétroactivement la redevance d'occupation depuis le début de l'installation illicite, majorée de pénalités. Ces sanctions sont indépendantes des règles d'urbanisme applicables aux terrasses privées.
Faut-il une autorisation pour des tables devant un commerce ?
Oui, même quelques tables et chaises sur le trottoir nécessitent une autorisation. Le permis de stationnement est le titre adapté pour du mobilier léger et amovible. Sans cette autorisation, le mobilier constitue une occupation illégale du domaine public. Certaines communes tolèrent 1 à 2 tables sans autorisation formelle, mais cette tolérance n'a pas de valeur juridique et peut cesser à tout moment. Pour éviter tout risque, demandez systématiquement l'autorisation.
Conclusion
L'autorisation de terrasse sur domaine public relève d'une procédure administrative distincte des autorisations d'urbanisme classiques. Le permis de stationnement ou la permission de voirie, délivrés par la mairie, encadrent cette occupation précaire et payante du trottoir.
Les règles sont strictes : respect du règlement local, maintien de la circulation piétonne, conformité du mobilier, paiement de la redevance. Les sanctions en cas d'infraction sont dissuasives (1 500 € d'amende, retrait du mobilier).
Avant tout projet de terrasse extérieure, déterminez si l'espace concerné est privé ou public. Sur terrain privé, ce sont les règles d'urbanisme qui s'appliquent : une terrasse surélevée ou couverte peut nécessiter une déclaration préalable selon sa configuration. La différence entre plan de masse et plan de situation ou le recours à une isolation extérieure relèvent du Code de l'urbanisme, pas de l'occupation du domaine public.
Contactez le service commerce ou voirie de votre mairie pour obtenir le règlement des terrasses et les formulaires de demande adaptés à votre commune.
Sources : Code général de la propriété des personnes publiques (articles L2122-1 et suivants), Loi Climat et Résilience 2021, règlements locaux des terrasses
