SCoT : Schéma de Cohérence Territoriale – Rôle et Impact sur votre Projet

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Le SCoT vous semble abstrait ? C'est pourtant un document qui peut conditionner la constructibilité de votre terrain. Le Schéma de Cohérence Territoriale définit les grandes orientations d'aménagement à l'échelle d'un bassin de vie : où urbaniser, où préserver, comment organiser les transports. Et surtout, le PLU de votre commune doit être compatible avec le SCoT. Si votre terrain se situe dans une commune sans SCoT couvrant le territoire, certaines zones ne peuvent tout simplement pas être ouvertes à l'urbanisation. Cette "règle de constructibilité limitée" peut bloquer des projets. Après avoir analysé l'impact des SCoT sur de nombreux dossiers, je vais vous expliquer comment ce document influence vos possibilités de construction.

Sommaire

Qu'est-ce que le SCoT ?

Définition et cadre juridique

Le SCoT (Schéma de Cohérence Territoriale) est un document de planification stratégique à l'échelle intercommunale ou d'un bassin de vie. Il fixe les grandes orientations d'aménagement du territoire sur 15 à 20 ans : développement urbain, mobilités, environnement, économie.

Créé par la loi SRU de 2000, le SCoT remplace les anciens schémas directeurs. Il est encadré par les articles L141-1 et suivants du Code de l'urbanisme.

Le schéma de cohérence territoriale n'est pas un document d'urbanisme directement opposable aux autorisations de construire. C'est un document-cadre que les PLU doivent respecter dans une relation de compatibilité.

Qui élabore le SCoT ?

Le SCoT est élaboré par un EPCI (Établissement Public de Coopération Intercommunale) ou un syndicat mixte regroupant plusieurs intercommunalités. Le périmètre correspond généralement à un bassin de vie : aire urbaine, pays, agglomération.

Exemples de périmètres SCoT :

  • Aire métropolitaine (ex : SCoT de l'agglomération lyonnaise)
  • Pays rural (ex : SCoT du Pays de Bray)
  • Littoral (ex : SCoT du Pays Basque)

La notion de PLU compatible SCoT

Le PLU (Plan Local d'Urbanisme) doit être "compatible" avec le SCoT. Cela signifie que le PLU ne peut pas aller à l'encontre des orientations du SCoT, mais dispose d'une marge de manœuvre dans sa mise en œuvre.

Compatibilité ≠ Conformité :

  • Conformité : respect à la lettre (contraignant)
  • Compatibilité : respect de l'esprit (plus souple)

Contenu et objectifs du SCoT

Les documents du SCoT

Le SCoT comprend trois documents principaux :

1. Rapport de présentation
Diagnostic du territoire : démographie, économie, environnement, mobilités, habitat. Analyse des besoins et des enjeux. Évaluation environnementale.

2. Projet d'Aménagement Stratégique (PAS)
Définit les grandes orientations à 15-20 ans : où développer, où préserver, quels axes de transport, quels équipements. C'est la vision politique du territoire.

3. Document d'Orientation et d'Objectifs (DOO)
Traduit le PAS en objectifs concrets que les PLU devront respecter : densités minimales, localisation des zones à urbaniser, protection des espaces naturels et agricoles.

Objectifs principaux

Le SCoT poursuit plusieurs objectifs définis par la loi :

Équilibre habitat-emplois-transports
Rapprocher les zones d'habitat des zones d'emploi, développer les transports en commun, limiter l'étalement urbain.

Protection des espaces naturels et agricoles
Identifier les espaces à préserver, limiter la consommation de terres agricoles, protéger les continuités écologiques (trame verte et bleue).

Mixité sociale et fonctionnelle
Répartir les logements sociaux, diversifier les fonctions urbaines, assurer l'accès aux équipements.

Gestion économe de l'espace
Densifier les zones urbanisées plutôt qu'en créer de nouvelles, renouveler l'urbain, limiter le mitage.

Les lois Littoral et Montagne

Dans les territoires concernés, le SCoT précise l'application de la loi Littoral (protection des côtes) et de la loi Montagne (urbanisation en continuité). Ces lois imposent des contraintes fortes que le SCoT doit intégrer et parfois assouplir dans un cadre encadré.

Relation entre SCoT et PLU

Hiérarchie des normes

La planification urbaine française obéit à une hiérarchie :

  1. Niveau national : lois (SRU, ALUR, Climat) et règlements
  2. Niveau régional : SRADDET (Schéma Régional)
  3. Niveau intercommunal : SCoT
  4. Niveau communal : PLU / PLUi

Le PLU doit être compatible avec le SCoT, qui lui-même doit être compatible avec le SRADDET.

Ce que le SCoT impose au PLU

Le Document d'Orientation et d'Objectifs (DOO) du SCoT peut imposer :

  • Densités minimales : par exemple 25 logements/ha en zone U
  • Localisation des zones AU : où ouvrir à l'urbanisation
  • Protection d'espaces : zones naturelles ou agricoles à maintenir
  • Armature commerciale : où implanter les grandes surfaces
  • Objectifs logement : répartition par commune

Le PLU doit traduire ces orientations dans son zonage et son règlement.

Mise en compatibilité du PLU

Lorsqu'un nouveau SCoT est approuvé, les PLU existants doivent être mis en compatibilité dans un délai de 3 ans. Cette mise en compatibilité peut impacter la constructibilité de certains terrains.

Impact du SCoT sur la constructibilité

La règle de constructibilité limitée

L'article L142-4 du Code de l'urbanisme pose une règle fondamentale : en l'absence de SCoT, les communes ne peuvent pas ouvrir à l'urbanisation les zones AU de leur PLU (sauf dérogation préfectorale).

Concrètement, si votre terrain est classé en zone 2AU (fermée) et que la commune n'est pas couverte par un SCoT, ce terrain ne pourra pas être rendu constructible avant l'approbation d'un SCoT.

Cette règle vise à éviter l'urbanisation dispersée et à inciter les territoires à se doter d'un SCoT.

Zones concernées

Zones bloquées sans SCoT :

  • Zones AU (à urbaniser) non ouvertes
  • Extensions d'urbanisation en discontinuité
  • Certains projets commerciaux de grande surface

Zones non concernées :

  • Zones U (déjà urbanisées) : constructibles
  • Zones A et N : pas de changement
  • Parties urbanisées des communes sans PLU

Vérifier la situation de votre terrain

Pour savoir si votre terrain est impacté :

  1. Consultez le PLU de votre commune
  2. Identifiez la zone (U, AU, A, N)
  3. Vérifiez si un SCoT couvre le territoire
  4. Demandez un certificat d'urbanisme

Le certificat d'urbanisme opérationnel vous dira si votre projet est réalisable dans l'état actuel des documents d'urbanisme.

Procédure d'élaboration du SCoT

Étapes principales

1. Prescription (6 mois)
Le syndicat mixte ou l'EPCI décide d'élaborer le SCoT. Définition du périmètre et de la gouvernance.

2. Diagnostic (12-18 mois)
Études du territoire : démographie, économie, environnement. Consultation des communes et des habitants.

3. Projet (12 mois)
Rédaction du PAS et du DOO. Débats sur les orientations stratégiques.

4. Arrêt du projet (3 mois)
Le projet est arrêté par délibération. Transmission pour avis aux personnes publiques associées.

5. Enquête publique (2 mois)
Le public peut consulter le projet et formuler des observations. Un commissaire enquêteur rend un avis.

6. Approbation
Après modifications éventuelles, le SCoT est approuvé par le conseil syndical.

Délai total

L'élaboration d'un SCoT prend généralement 4 à 6 ans. C'est un processus long qui implique de nombreux acteurs.

Révision et modification

Le SCoT peut être :

  • Modifié : changements mineurs sans enquête publique
  • Révisé : changements majeurs avec nouvelle procédure complète

La loi Climat et Résilience de 2021 impose une révision des SCoT pour intégrer l'objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) d'ici 2050.

Cas pratiques et exemples

Exemple 1 : Terrain bloqué par l'absence de SCoT

Situation : Terrain de 5 000 m² classé 2AU dans une commune rurale. Le propriétaire veut le vendre comme terrain à bâtir.

Problème : La commune n'est pas couverte par un SCoT. La zone 2AU ne peut pas être ouverte à l'urbanisation sans dérogation préfectorale.

Solution : Attendre l'approbation du SCoT intercommunal en cours d'élaboration (prévu dans 2 ans), ou demander une dérogation au préfet (rarement accordée).

Exemple 2 : PLU non compatible avec le nouveau SCoT

Situation : Un SCoT approuvé impose une densité minimale de 20 logements/ha en zone U. Le PLU de la commune prévoit seulement 10 logements/ha.

Conséquence : Le PLU doit être mis en compatibilité dans les 3 ans. Les futurs permis de construire devront respecter la nouvelle densité.

Impact : Un projet de lotissement de 10 maisons sur 2 ha (5 logements/ha) pourrait être refusé pour incompatibilité avec le SCoT.

Exemple 3 : Ouverture d'une zone AU grâce au SCoT

Situation : Une commune veut ouvrir une zone 1AU de 10 ha pour créer un nouveau quartier.

Analyse : Le SCoT identifie cette zone comme "secteur de développement prioritaire" avec une densité de 35 logements/ha minimum.

Procédure : La commune modifie son PLU pour ouvrir la zone, en respectant les prescriptions du SCoT. Le permis d'aménager (lotissement) peut ensuite être déposé.

Exemple 4 : Protection agricole imposée par le SCoT

Situation : Un agriculteur veut vendre une partie de son exploitation pour un projet immobilier.

Problème : Le SCoT a identifié ces terres comme "espace agricole protégé". Le PLU devra les classer en zone agricole (A) lors de sa révision.

Conséquence : Le projet immobilier est compromis. Seuls les bâtiments agricoles seront autorisés.

Erreurs à éviter

Erreur 1 : Ignorer le SCoT lors de l'achat d'un terrain

Un terrain classé AU dans le PLU n'est pas nécessairement constructible. Vérifiez si un SCoT couvre le territoire et ce qu'il prévoit pour ce secteur.

Erreur 2 : Confondre SCoT et PLU

Le SCoT n'est pas directement opposable à votre permis de construire. C'est le PLU qui définit les règles. Mais le PLU doit être compatible avec le SCoT.

Erreur 3 : Ne pas anticiper les évolutions

Les SCoT sont régulièrement révisés. Un terrain constructible aujourd'hui peut être protégé demain. Suivez l'actualité de votre SCoT.

Erreur 4 : Sous-estimer les délais

L'élaboration d'un SCoT prend 4 à 6 ans. Si vous attendez qu'il soit approuvé pour construire en zone AU, armez-vous de patience.

Erreur 5 : Oublier les contraintes supra-communales

Le SCoT peut imposer des contraintes que le PLU de votre commune ne mentionne pas directement : densités, objectifs de logement, protection d'espaces. Consultez le DOO du SCoT.

Questions fréquentes

Qu’est-ce que le SCoT ?

Le SCoT (Schéma de Cohérence Territoriale) est un document de planification stratégique à l'échelle intercommunale. Il définit les grandes orientations d'aménagement du territoire pour 15 à 20 ans : où développer l'urbanisation, où préserver les espaces naturels et agricoles, comment organiser les transports. Le SCoT n'est pas directement opposable aux permis de construire, mais les PLU doivent être compatibles avec ses orientations.

Le PLU doit-il respecter le SCoT ?

Oui, le PLU doit être "compatible" avec le SCoT. Cela signifie que le PLU ne peut pas contredire les orientations du SCoT, mais dispose d'une marge de manœuvre dans leur mise en œuvre. Par exemple, si le SCoT impose une densité minimale de 25 logements/ha, le PLU peut prévoir 30 logements/ha mais pas 15. Lors de l'approbation d'un nouveau SCoT, les PLU existants ont 3 ans pour se mettre en compatibilité.

Le SCoT est-il obligatoire pour construire ?

Pas directement, mais l'absence de SCoT peut bloquer certains projets. Sans SCoT, les communes ne peuvent pas ouvrir à l'urbanisation leurs zones AU (à urbaniser), sauf dérogation préfectorale. Un terrain en zone U (déjà urbanisée) reste constructible même sans SCoT. Cette règle de "constructibilité limitée" incite les territoires à se doter d'un SCoT pour maîtriser leur développement.

Comment savoir si mon terrain est en zone inondable ?

Le SCoT identifie les risques à l'échelle du territoire, mais c'est le Plan de Prévention des Risques Inondation (PPRI) qui définit précisément les zones inondables. Consultez les annexes du PLU de votre commune, le site Géorisques (georisques.gouv.fr), ou demandez un certificat d'urbanisme. Les zones inondables figurent également sur le plan de masse pour permis de construire avec les servitudes applicables.

Comment savoir si mon local est un ERP ?

Un ERP (Établissement Recevant du Public) est un bâtiment ou local accueillant des personnes extérieures. Le SCoT peut définir l'armature commerciale (où implanter les ERP commerciaux), mais c'est le Code de la construction qui définit les règles ERP. Votre local est un ERP s'il accueille du public : commerce, restaurant, bureau recevant des clients, cabinet médical. Les règles de sécurité et d'accessibilité dépendent de la catégorie (effectif).

Comment savoir si je suis en zone ABF ?

Les zones ABF (périmètres des monuments historiques, sites inscrits, secteurs sauvegardés) figurent dans les annexes du PLU et sur l'Atlas des patrimoines (atlas.patrimoines.culture.fr). Le SCoT identifie les enjeux patrimoniaux à l'échelle du territoire mais ne définit pas les périmètres précis. Un certificat d'urbanisme précisera si votre terrain est en zone ABF et quelles contraintes s'appliquent.

Comment savoir si mon terrain est argileux ?

Le risque retrait-gonflement des argiles figure sur Géorisques (georisques.gouv.fr). Le SCoT peut identifier les zones à risque, mais c'est l'étude géotechnique qui caractérise précisément le sol. Depuis 2020, une étude de sol est obligatoire pour les maisons individuelles en zone d'aléa moyen ou fort. Cette étude conditionne le type de fondations et peut impacter le coût de construction de 5 000 à 20 000 €.

Conclusion

Le SCoT est un document stratégique qui conditionne indirectement la constructibilité de votre terrain. En fixant les grandes orientations d'aménagement à l'échelle intercommunale, il détermine où les communes pourront ouvrir des zones à l'urbanisation.

Points clés à retenir :

  • Le SCoT encadre le PLU dans une relation de compatibilité
  • Sans SCoT, les zones AU ne peuvent pas être ouvertes à l'urbanisation
  • Le SCOT intercommunal définit les grandes orientations pour 15-20 ans
  • Les PLU doivent se mettre en compatibilité dans les 3 ans après un nouveau SCoT
  • Le certificat d'urbanisme vous dira si votre terrain est impacté

Avant tout projet immobilier, vérifiez la situation de votre territoire. Consultez les formulaires CERFA appropriés, calculez votre surface de plancher, et anticipez les contraintes du SCoT.

Pour un projet nécessitant un architecte (plus de 150 m²), celui-ci connaît les orientations du SCoT et saura intégrer les contraintes dans la conception.

Enfin, restez informé des évolutions : la loi Climat impose une révision des SCoT pour intégrer l'objectif ZAN (zéro artificialisation nette), ce qui renforcera encore les contraintes sur les zones naturelles et agricoles.


Sources : Legifrance (articles L141-1 et suivants, L142-4 du Code de l'urbanisme), Ministère de la Transition écologique