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Piscine Naturelle : Procédure et Obligations

Piscine Naturelle : Autorisation et Réglementation

Temps de lecture : 12 minutes

Vous rêvez d'une baignade écologique dans votre jardin ? La piscine naturelle séduit de plus en plus de propriétaires par son intégration paysagère et l'absence de produits chimiques. Mais attention : même si elle ressemble davantage à un étang qu'à un bassin classique, la réglementation urbanistique s'applique exactement de la même façon. Un bassin de 60 m² avec sa zone de lagunage vous expose aux mêmes obligations qu'une piscine coque ou une piscine béton traditionnelle. Déclaration préalable ? Permis de construire ? Taxe d'aménagement ? Ce sont les mêmes règles, avec quelques subtilités liées à la configuration particulière de ce type d'ouvrage. Je vais vous expliquer précisément quelles démarches entreprendre selon votre projet, les pièges à éviter, et comment monter un dossier solide pour obtenir votre autorisation.

Sommaire

Qu'est-ce qu'une piscine naturelle ?

La piscine naturelle, également appelée baignade naturelle ou piscine écologique, est un bassin qui utilise les plantes aquatiques et les micro-organismes pour filtrer et purifier l'eau, sans recours aux produits chimiques type chlore. Elle se compose généralement de deux zones distinctes : une zone de baignade (le bassin proprement dit) et une zone de régénération (le lagunage) où poussent les plantes filtrantes.

Cadre réglementaire

Du point de vue du Code de l'urbanisme, une piscine naturelle est traitée exactement comme une piscine enterrée classique. L'article R421-2 ne fait aucune distinction selon le mode de traitement de l'eau. Ce qui compte, c'est la surface du miroir d'eau et la présence ou non d'un abri.

Les seuils déclenchant une autorisation sont identiques à ceux d'une piscine creusée ou d'une piscine coque :

Surface du bassin Hauteur abri Autorisation requise
≤ 10 m² Pas d'abri ou < 1,80 m Aucune formalité
10 à 100 m² Pas d'abri ou < 1,80 m Déclaration préalable
> 100 m² Pas d'abri ou < 1,80 m Permis de construire
Toute surface ≥ 1,80 m Permis de construire

Point crucial : pour une piscine naturelle, la surface à déclarer est celle du miroir d'eau total, zone de lagunage comprise. Un bassin de 40 m² avec une zone de régénération de 25 m² représente donc 65 m² déclarables, ce qui reste dans le cadre de la déclaration préalable.

Particularité de la piscine naturelle

Contrairement à une construction classique, la piscine naturelle ne crée pas de surface de plancher. Elle génère uniquement de l'emprise au sol si vous la considérez comme une excavation permanente. Cependant, le local technique piscine qui abrite la pompe de circulation est une construction à part entière. S'il dépasse 5 m², il devra être déclaré séparément ou intégré à votre demande.

Quelle autorisation pour une piscine naturelle ?

La déclaration préalable : cas le plus fréquent

La grande majorité des piscines naturelles nécessitent une déclaration préalable. Avec des surfaces comprises généralement entre 40 et 80 m² (bassin + lagunage), vous êtes presque toujours dans cette tranche 10-100 m².

Pour déposer votre déclaration, vous utiliserez le CERFA 13703, ou sa version numérique disponible sur le guichet unique de l'urbanisme. Le formulaire spécifique pour les piscines est le CERFA piscine enterrée qui vous guide dans les rubriques à remplir.

Quand le permis de construire s'impose

Le permis piscine devient obligatoire dans trois situations :

  1. Surface supérieure à 100 m² : rare pour une piscine naturelle privée, mais certains projets ambitieux avec grande zone de lagunage peuvent atteindre ce seuil

  2. Piscine couverte avec abri > 1,80 m : si vous prévoyez d'installer une structure de type véranda au-dessus de votre bassin, vous basculez automatiquement en piscine couverte permis de construire

  3. Zone protégée : en secteur ABF (Architecte des Bâtiments de France), certaines communes imposent le permis même pour des surfaces moindres

La piscine hors-sol : exception limitée

Une piscine hors-sol installée moins de 3 mois par an (15 jours en zone protégée) échappe à toute formalité. Mais par définition, une piscine naturelle est enterrée : cette dispense ne vous concerne pas.

Le cas du local technique

Toute piscine, naturelle ou non, nécessite un local technique pour abriter la pompe, les filtres UV éventuels, et le système électrique. Ce local technique piscine constitue une construction annexe :

  • Moins de 5 m² : dispense de formalité
  • 5 à 20 m² : déclaration préalable
  • Plus de 20 m² : permis de construire

Conseil pratique : intégrez le local technique dans votre déclaration préalable de piscine. Un seul dossier, une seule instruction.

Procédure complète de déclaration

Étape 1 : Vérifier le PLU

Avant toute démarche, consultez le Plan Local d'Urbanisme de votre commune. Le PLU peut imposer des règles spécifiques :

  • Distance aux limites séparatives : souvent 3 mètres minimum, parfois davantage
  • Emprise au sol maximale : la piscine compte dans le calcul du CES
  • Zone naturelle ou agricole : la piscine peut être interdite ou soumise à conditions

Pour bien comprendre la différence entre plan de masse et plan de situation, sachez que le premier montre l'implantation précise sur votre terrain, le second localise votre parcelle dans la commune.

Étape 2 : Constituer le dossier

Votre déclaration préalable doit contenir :

Pièces obligatoires :

  • DP1 : Plan de situation (échelle 1/5000 ou 1/25000)
  • DP2 : Plan de masse coté montrant la piscine et ses distances aux limites
  • DP3 : Plan en coupe du terrain
  • DP4 : Plan des façades (si local technique visible)
  • DP6 : Document graphique d'insertion paysagère
  • DP7/DP8 : Photographies de l'environnement proche et lointain

Pour le plan de masse, vous pouvez consulter nos exemples de plan de masse annotés. Si votre terrain présente une topographie complexe, faites appel à un géomètre pour le plan de masse.

Pièces complémentaires selon contexte :

  • Attestation de l'architecte (uniquement si projet global > 150 m²)
  • Notice descriptive détaillant le fonctionnement du lagunage
  • Plan des réseaux (arrivée d'eau, électricité)

Étape 3 : Déposer et suivre

Le dépôt du dossier se fait en mairie ou par voie dématérialisée. Vous recevrez un récépissé indiquant :

  • Le numéro de dossier
  • La date de dépôt
  • Le délai d'instruction applicable

Le délai légal est d'1 mois pour une déclaration préalable classique, porté à 2 mois en secteur ABF. Passé ce délai sans réponse, vous bénéficiez d'un accord tacite (sauf exceptions : ERP, zone protégée…).

Étape 4 : Afficher et construire

Une fois l'autorisation obtenue (ou tacite), affichez le panneau réglementaire sur le terrain pendant toute la durée des travaux. Les tiers disposent de 2 mois pour contester. Le bassin est ensuite soumis à la taxe d'aménagement : comptez environ 250 €/m² de valeur forfaitaire, multipliée par le taux communal (entre 1 et 5 % selon les communes).

Cas pratiques et exemples

Exemple 1 : Piscine naturelle familiale

Projet : Bassin de baignade de 35 m² + zone de lagunage de 20 m², soit 55 m² au total. Pas de local technique apparent (enterré). Terrain en zone UB du PLU, à 8 mètres des limites séparatives.

Autorisation : Déclaration préalable simple. Surface entre 10 et 100 m², pas d'abri. Délai d'instruction : 1 mois.

Budget démarches : Dossier réalisé soi-même avec logiciel gratuit pour le plan de masse. Coût total administratif : 0 € (hors taxe d'aménagement estimée à 700 € avec taux communal de 2,5 %).

Exemple 2 : Piscine naturelle avec abri

Projet : Bassin de 45 m² + lagunage de 15 m² = 60 m². Abri télescopique de 2,10 m de hauteur au point le plus haut. Local technique de 8 m² accolé à la maison.

Autorisation : Permis de construire obligatoire. L'abri dépasse 1,80 m, peu importe la surface du bassin. Délai : 2 mois.

Particularité : Si la maison fait 140 m² et qu'on ajoute le local technique de 8 m², le total atteint 148 m². Pas besoin d'architecte. Mais avec une maison de 145 m², le total passerait à 153 m² : architecte obligatoire.

Exemple 3 : Projet en zone ABF

Projet : Piscine naturelle de 50 m² à 200 mètres d'un monument historique classé. Pas d'abri prévu.

Autorisation : Déclaration préalable, mais avec avis conforme de l'ABF. Délai : 2 mois au lieu d'1 mois. L'ABF peut imposer des prescriptions : couleur du liner (teintes naturelles), végétation du lagunage (espèces locales), clôture de sécurité discrète.

Conseil : Anticipez en prenant rendez-vous avec l'ABF avant de déposer. Son avis préalable officieux peut vous éviter un refus.

Erreurs à éviter

Erreur 1 : Oublier la zone de lagunage dans le calcul

C'est l'erreur la plus fréquente sur les piscines naturelles. Le lagunage fait partie intégrante du bassin au sens de l'urbanisme. Un bassin de 45 m² avec un lagunage de 60 m² représente 105 m² déclarables, soit un permis de construire obligatoire, pas une simple déclaration.

Erreur 2 : Construire sans autorisation

Les services d'urbanisme repèrent facilement les piscines non déclarées : survol aérien, dénonciation de voisins, contrôle lors de la vente… Les sanctions sont lourdes : jusqu'à 6 000 € par m² d'amende, obligation de démolition possible. Si vous avez une piscine non déclarée, la régularisation reste possible mais n'est jamais garantie.

Erreur 3 : Négliger les distances aux limites

Le PLU impose généralement un recul de 3 mètres minimum par rapport aux limites séparatives. Ce recul se calcule depuis le bord du bassin ou du lagunage, pas depuis la plage. Une piscine naturelle, souvent plus étendue qu'une piscine classique, peut vite empiéter sur cette zone interdite.

Erreur 4 : Sous-estimer l'impact du local technique

Un local technique de 12 m² transforme votre déclaration simple en déclaration plus complexe. S'il dépasse 20 m², c'est un permis de construire. Pensez aussi à son aspect : en zone ABF, un cabanon en PVC blanc sera refusé.

Erreur 5 : Oublier la sécurité obligatoire

Depuis 2004, toute piscine enterrée privée doit être équipée d'un dispositif de sécurité normalisé : barrière, alarme, couverture ou abri. La piscine naturelle n'échappe pas à cette règle (article L128-1 du Code de la construction). L'absence de dispositif expose à 45 000 € d'amende.

Questions fréquentes

Faut-il un permis pour construire une piscine naturelle ?

Pas systématiquement. Une piscine naturelle de moins de 10 m² sans abri ne nécessite aucune formalité. Entre 10 et 100 m² (bassin + lagunage), une déclaration préalable suffit. Au-delà de 100 m² ou avec un abri de plus de 1,80 m de haut, le permis de construire devient obligatoire. En zone protégée ABF, les règles peuvent être renforcées par la commune.

Piscine enterrée : permis ou déclaration préalable ?

Pour une piscine enterrée classique ou naturelle, la déclaration préalable s'applique aux bassins de 10 à 100 m² non couverts ou avec abri inférieur à 1,80 m. Le permis de construire concerne les bassins de plus de 100 m² ou équipés d'un abri dépassant 1,80 m de hauteur. Ces seuils sont définis par les articles R421-9 et R421-1 du Code de l'urbanisme.

Quelle hauteur d’abri piscine sans autorisation ?

Un abri de piscine de moins de 1,80 m de hauteur ne modifie pas le régime d'autorisation : votre piscine reste soumise à déclaration préalable si elle fait entre 10 et 100 m². Dès que l'abri dépasse 1,80 m au point le plus haut, le permis de construire devient obligatoire quelle que soit la surface du bassin. Cette règle figure à l'article R421-9 du Code de l'urbanisme.

Faut-il une autorisation pour un abri de piscine ?

Oui, dans la plupart des cas. Un abri de piscine de moins de 1,80 m ne change pas l'autorisation de base (déclaration préalable pour un bassin de 10-100 m²). Un abri dépassant 1,80 m déclenche automatiquement un permis de construire car il transforme la piscine en construction couverte. Même un abri bas peut nécessiter une déclaration si votre piscine n'a jamais été déclarée.

Peut-on construire une piscine sans permis ?

Oui, mais uniquement pour les très petits bassins. Une piscine sans permis est possible si elle fait moins de 10 m² et n'a pas d'abri ou un abri inférieur à 1,80 m. Au-delà, une déclaration préalable ou un permis est obligatoire. Construire une piscine de 50 m² sans autorisation vous expose à une amende pouvant atteindre 300 000 € (6 000 €/m²) et à une obligation de démolition.

Quelle autorisation pour une piscine de 50 m² ?

Une piscine de 50 m² nécessite une déclaration préalable si elle n'a pas d'abri ou si l'abri fait moins de 1,80 m de haut. Le délai d'instruction est d'1 mois (2 mois en zone ABF). Si vous ajoutez un abri dépassant 1,80 m, il faudra déposer un permis de construire avec un délai de 2 mois. Dans tous les cas, vous devrez acquitter la taxe d'aménagement après obtention de l'autorisation.

La zone de lagunage compte-t-elle dans la surface déclarée ?

Oui, absolument. Pour une piscine naturelle, la surface à déclarer est celle du miroir d'eau total : bassin de baignade + zone de régénération (lagunage). Un bassin de 40 m² avec un lagunage de 30 m² représente 70 m² déclarables. C'est une erreur fréquente de ne déclarer que la partie baignade, ce qui peut entraîner un procès-verbal d'infraction lors d'un contrôle.

Conclusion

La piscine naturelle obéit aux mêmes règles d'urbanisme que toute piscine enterrée. En dessous de 10 m², aucune formalité. Entre 10 et 100 m², une déclaration préalable suffit dans la majorité des cas. Au-delà, ou avec un abri de plus de 1,80 m, le permis de construire s'impose.

L'erreur la plus fréquente reste d'oublier la zone de lagunage dans le calcul de la surface. Un projet de 90 m² comprenant 50 m² de bassin et 40 m² de lagunage frôle la limite du permis de construire.

Avant de vous lancer, consultez le PLU de votre commune et vérifiez les distances aux limites séparatives. En zone protégée, prenez rendez-vous avec l'Architecte des Bâtiments de France pour anticiper ses exigences. Et si vous souhaitez d'autres travaux comme une extension de 20 m² ou une isolation extérieure, pensez à regrouper vos demandes pour simplifier l'instruction.

Une piscine naturelle bien déclarée, c'est la garantie de profiter de votre baignade l'esprit tranquille, sans risque de contentieux avec la mairie ou les voisins.


Sources : Legifrance (articles R421-1 à R421-17 du Code de l'urbanisme), Service-public.fr