Surface Habitable vs Surface de Plancher : Comment les Calculer et les Distinguer ?

Temps de lecture : 14 minutes

Surface de plancher, surface habitable, emprise au sol : trois notions qui reviennent constamment dans les projets de construction, mais que beaucoup confondent. Cette confusion n'est pas anodine. Déclarer 38 m² de surface de plancher créée alors que le calcul réel donne 42 m² peut transformer une simple déclaration préalable en permis de construire obligatoire. Pire, une erreur de calcul peut vous faire franchir le seuil des 150 m² et vous contraindre à recourir à un architecte. Ces surfaces ne se mesurent pas de la même façon et ne servent pas aux mêmes usages. La surface de plancher (SDP) détermine les autorisations d'urbanisme, la surface habitable définit la valeur locative et la taxe foncière. Maîtriser leur calcul est indispensable avant de déposer votre dossier en mairie.

Sommaire

Qu'est-ce que la surface de plancher ?

La surface de plancher (SDP) est la notion centrale du droit de l'urbanisme depuis le 1er mars 2012. Elle a remplacé les anciennes SHOB (Surface Hors Œuvre Brute) et SHON (Surface Hors Œuvre Nette) dans un souci de simplification.

Définition légale

L'article R111-22 du Code de l'urbanisme définit la surface de plancher comme « la somme des surfaces de plancher de chaque niveau clos et couvert, calculée à partir du nu intérieur des façades ».

En clair : on mesure depuis l'intérieur des murs extérieurs (pas depuis l'extérieur), et on additionne tous les niveaux du bâtiment.

Éléments déduits du calcul

Certains espaces ne comptent pas dans la surface de plancher :

Élément Déduction
Surfaces avec hauteur < 1,80 m 100 % déduit
Trémies d'escalier et d'ascenseur 100 % déduit
Rampes d'accès 100 % déduit
Aires de stationnement 100 % déduit
Locaux techniques (chaufferie, etc.) 100 % déduit
Caves et celliers en sous-sol 100 % déduit
Combles non aménageables 100 % déduit

Les combles aménageables comptent-ils dans la surface ? Oui, dès lors que la hauteur sous plafond dépasse 1,80 m et que l'espace est clos et couvert.

Pourquoi la SDP est-elle cruciale ?

La surface de plancher détermine :

  • Le type d'autorisation nécessaire (DP ou PC)
  • L'obligation de recourir à un architecte
  • Les droits à construire restants sur la parcelle
  • La taxe d'aménagement à payer

Une erreur de calcul de quelques mètres carrés peut avoir des conséquences importantes sur votre projet.

Qu'est-ce que la surface habitable ?

La surface habitable (SHAB) est une notion du Code de la construction et de l'habitation, distincte de l'urbanisme. Elle sert principalement dans le domaine locatif et fiscal.

Définition légale

L'article R156-1 du Code de la construction définit la surface habitable comme « la surface de plancher construite, après déduction des surfaces occupées par les murs, cloisons, marches et cages d'escaliers, gaines, embrasures de portes et de fenêtres ».

La différence fondamentale : on déduit l'épaisseur des cloisons intérieures, pas seulement des murs de façade.

Éléments exclus de la surface habitable

La SHAB exclut davantage d'espaces que la SDP :

Élément Compté en SHAB ?
Garage Non
Cave Non
Grenier non aménagé Non
Terrasse Non
Balcon Non
Loggia Non
Véranda non chauffée Non
Combles non aménagés Non
Sous-sol Non
Remise Non
Dépendances Non

Usages de la surface habitable

La surface habitable sert pour :

  • Le bail d'habitation (loi Boutin : mention obligatoire)
  • Le calcul de la valeur locative cadastrale
  • L'attestation de superficie en copropriété (loi Carrez, proche mais différente)
  • La déclaration fiscale H1/H2 pour la taxe foncière

Tableau comparatif des deux surfaces

Critère Surface de plancher (SDP) Surface habitable (SHAB)
Texte de référence Code de l'urbanisme (R111-22) Code de la construction (R156-1)
Point de mesure Nu intérieur des façades Après déduction des cloisons
Hauteur minimum 1,80 m 1,80 m
Garage inclus ? Non Non
Cave incluse ? Non Non
Murs de façade Inclus (mesure depuis l'intérieur) Exclus
Cloisons intérieures Incluses Exclues
Usage principal Autorisations d'urbanisme Bail, fiscalité
Résultat Plus grande Plus petite

En pratique : pour une même maison, la SDP est toujours supérieure à la SHAB d'environ 5 à 10 %, selon l'épaisseur des cloisons intérieures.

Comment calculer la surface de plancher

Méthode pas à pas

Étape 1 : Identifier les niveaux clos et couverts

Comptez tous les niveaux de votre construction : rez-de-chaussée, étages, sous-sol aménagé, combles aménageables. Un espace est clos s'il est fermé par des parois (murs, vitrage), couvert s'il possède un toit ou plafond.

Étape 2 : Mesurer depuis le nu intérieur des façades

Placez votre mètre contre la face intérieure du mur extérieur, pas contre la cloison de doublage ou l'isolant. Si les murs font 30 cm d'épaisseur, vous mesurez depuis la limite intérieure de ces 30 cm.

Étape 3 : Vérifier les hauteurs

Tout espace dont la hauteur sous plafond est inférieure à 1,80 m doit être exclu. Sous les combles, tracez une ligne à 1,80 m du sol : seule la surface au-delà de cette ligne compte.

Étape 4 : Déduire les éléments non comptabilisés

Retirez du total :

  • Les trémies d'escalier (le vide, pas l'escalier lui-même)
  • Les rampes d'accès et leurs paliers
  • Les aires de stationnement intérieures
  • Les locaux techniques (chaufferie, local compteurs)

Étape 5 : Additionner les niveaux

La SDP totale est la somme de chaque niveau ainsi calculé.

Exemple de calcul détaillé

Maison avec RDC de 80 m² au sol, étage de 60 m² et combles partiellement aménageables :

Niveau Surface brute Déductions SDP
RDC 80 m² Garage 18 m² 62 m²
Étage 60 m² Trémie escalier 4 m² 56 m²
Combles 35 m² Partie < 1,80 m : 12 m² 23 m²
Total 141 m²

Cette maison de 141 m² de surface de plancher pourra être construite sans architecte (seuil 150 m²).

Cas particuliers

Véranda : Si elle est close et couverte avec hauteur > 1,80 m, la véranda crée de la surface de plancher. Une véranda de 15 m² ajoutée à une maison de 140 m² fera passer le total à 155 m² et déclenchera l'obligation d'architecte.

Mezzanine : Elle compte dans la SDP si elle est close, couverte et d'une hauteur > 1,80 m. Une mezzanine ouverte sur le séjour, sans cloison la fermant, peut être exclue.

Piscine couverte : Un abri de piscine de plus de 1,80 m de haut crée de la surface de plancher.

Comment calculer la surface habitable

Méthode pas à pas

Étape 1 : Partir de la surface de plancher

La SHAB se calcule généralement à partir de la SDP, en lui retranchant les éléments supplémentaires.

Étape 2 : Déduire les cloisons intérieures

Contrairement à la SDP, on retire l'épaisseur de toutes les cloisons : cloisons de distribution (entre pièces), cloisons de doublage (isolant intérieur). Comptez en moyenne 5 à 8 % de déduction.

Étape 3 : Déduire les embrasures

Les surfaces occupées par les ouvertures (portes, fenêtres) dans leur épaisseur sont exclues. C'est généralement négligeable (< 1 %).

Étape 4 : Exclure les annexes

Garage, cave, grenier, terrasse, balcon, cellier extérieur : tous exclus, même s'ils font partie du même bâtiment.

Exemple comparatif

Pour la maison calculée précédemment (141 m² SDP) :

Poste Surface
Surface de plancher 141 m²
– Cloisons intérieures (7 %) – 10 m²
– Embrasures – 1 m²
Surface habitable 130 m²

Le propriétaire devra déclarer 130 m² sur le bail de location, mais a bien 141 m² de surface de plancher pour l'urbanisme.

Les seuils réglementaires en urbanisme

La surface de plancher (et l'emprise au sol) détermine les seuils d'autorisation. Ces seuils sont fondamentaux pour votre projet.

Seuil des 5 m² : dispense de formalité

En dessous de 5 m² de surface de plancher ET d'emprise au sol, aucune autorisation n'est requise (sauf en zone protégée). C'est le cas d'un petit abri de jardin sans permis.

Seuil des 20 m² : déclaration préalable ou permis

Situation Surface créée Autorisation
Zone standard (RNU, hors PLU) 5 à 20 m² Déclaration préalable
Zone standard > 20 m² Permis de construire
Zone U d'un PLU (extension) 5 à 40 m² Déclaration préalable
Zone U d'un PLU (extension) > 40 m² Permis de construire

Pour une extension de 20 m² ou plus, la zone détermine l'autorisation nécessaire.

Seuil des 40 m² : spécificité zone urbaine

En zone U d'un PLU, les extensions jusqu'à 40 m² peuvent bénéficier de la déclaration préalable au lieu du permis. Attention : si le total après travaux dépasse 150 m², cette facilité ne s'applique pas et le permis reste obligatoire.

Seuil des 150 m² : architecte obligatoire

Le seuil de 150 m² détermine l'obligation de recourir à un architecte pour le dépôt du permis de construire. Ce seuil s'apprécie sur la surface totale après travaux :

Exemple 1 : Maison existante 120 m² + extension 25 m² = 145 m² → pas d'architecte obligatoire
Exemple 2 : Maison existante 130 m² + extension 25 m² = 155 m² → architecte obligatoire

La déclaration préalable n'est jamais soumise à l'obligation d'architecte, quelle que soit la surface.

Cas particulier : exploitations agricoles

Les bâtiments d'exploitation agricole bénéficient d'un seuil relevé à 800 m² avant obligation d'architecte. Un hangar agricole de 600 m² peut être construit sans architecte par l'exploitant.

Cas pratiques et exemples

Exemple 1 : Construction neuve de maison individuelle

Projet : Construction d'une maison neuve de 140 m² de SDP avec garage intégré de 25 m².

Calcul :

  • Partie habitable : 140 m²
  • Garage (déduit de la SDP) : 0 m² comptabilisé
  • Surface de plancher totale : 140 m²

Autorisation : Permis de construire (> 20 m²), sans architecte (< 150 m²).

Documents : CERFA 13406, pièces PCMI1 à PCMI8, dont le plan de masse pour le permis de construire.

Délai d'instruction : 2 mois en zone standard, 3 mois en zone ABF.

Exemple 2 : Extension avec franchissement du seuil 150 m²

Projet : Extension de 35 m² sur une maison existante de 125 m² en zone U d'un PLU.

Calcul :

  • Existant : 125 m²
  • Création : 35 m²
  • Total après travaux : 160 m²

Analyse :

  • Surface créée < 40 m² en zone U : en théorie, DP possible
  • MAIS total > 150 m² : l'exception ne s'applique pas

Autorisation : Permis de construire avec architecte obligatoire.

Conseil : Réduire l'extension à 24 m² permettrait de rester sous les 150 m² (125 + 24 = 149 m²) et d'éviter l'architecte.

Exemple 3 : Aménagement de combles

Projet : Aménagement de 45 m² de combles dans une maison de 95 m².

Calcul de la surface créée :

  • Surface brute des combles : 60 m²
  • Partie avec hauteur < 1,80 m : 15 m²
  • Nouvelle surface de plancher : 45 m²
  • Total après travaux : 95 + 45 = 140 m²

Autorisation :

  • En zone standard : PC (> 20 m² créés)
  • En zone U PLU : PC car > 40 m² créés
  • Pas d'architecte car total < 150 m²

L'aménagement de combles nécessite aussi la création d'ouvertures (velux, lucarnes), qui modifient l'aspect extérieur et doivent figurer dans la demande.

Exemple 4 : Garage double ou triple

Un garage double ou triple de 45 m² ne compte pas dans la surface de plancher (aire de stationnement), mais crée de l'emprise au sol :

Autorisation selon l'emprise :

  • Garage 18 m² (simple) : Déclaration préalable
  • Garage 35 m² (double) : Permis de construire (> 20 m² d'emprise)
  • Garage 50 m² (triple) : Permis de construire

Le garage ne faisant pas franchir le seuil des 150 m² de SDP, il n'y a pas d'obligation d'architecte.

Erreurs fréquentes à éviter

1. Confondre SDP et emprise au sol

L'emprise au sol est la projection verticale du bâtiment sur le terrain. Elle peut être supérieure à la SDP (bâtiment avec débords) ou inférieure (maison à étages). Les deux notions déclenchent les seuils : c'est la plus grande des deux qui compte.

2. Oublier de déduire les surfaces sous 1,80 m

Beaucoup surestiment leur SDP en comptant l'intégralité des combles. Seule la partie avec une hauteur supérieure à 1,80 m compte. Cette erreur peut vous faire croire à tort que vous dépassez le seuil des 150 m².

3. Comptabiliser le garage dans la SDP

Le garage est une aire de stationnement, donc exclu de la surface de plancher. Inutile de l'ajouter au calcul. En revanche, un local transformé en garage après construction doit être déclaré (changement de destination).

4. Négliger l'existant dans le calcul du seuil architecte

Le seuil des 150 m² s'apprécie sur le TOTAL après travaux, pas seulement sur la surface créée. Une extension modeste peut déclencher l'obligation d'architecte si la maison existante est déjà grande.

5. Se fier au DPE pour la surface

Le Diagnostic de Performance Énergétique utilise parfois des surfaces différentes (surface habitable ou de référence). Ne recopiez jamais le chiffre du DPE sur votre demande de permis : recalculez la SDP selon la méthode du Code de l'urbanisme.

6. Ignorer les sanctions

Une erreur de surface dans le dossier peut entraîner un refus, voire des poursuites si les travaux sont réalisés. En cas d'extension non autorisée, les amendes peuvent atteindre 6 000 € par m² de surface construite irrégulièrement. La prescription est de 6 ans au pénal, 10 ans au civil – un voisin peut agir longtemps via un recours des tiers.

Questions fréquentes

Quelle surface de combles aménagés sans autorisation ?

L'aménagement de combles crée de la surface de plancher dès que la hauteur sous plafond dépasse 1,80 m. En dessous de 5 m² de surface créée, aucune formalité n'est requise. De 5 à 20 m² (ou 40 m² en zone U), une déclaration préalable suffit. Au-delà, un permis de construire est obligatoire. Ces seuils concernent uniquement la partie avec une hauteur supérieure à 1,80 m.

Comment calculer la surface de plancher créée lors d’un aménagement de combles ?

Pour calculer la surface de plancher créée dans les combles, mesurez l'espace au sol depuis le nu intérieur des murs de façade, puis excluez toutes les zones où la hauteur sous rampant est inférieure à 1,80 m. Tracez une ligne horizontale à 1,80 m du sol : seule la surface délimitée par cette ligne et les murs compte. N'oubliez pas de déduire les trémies d'escalier qui desservent ces combles.

À partir de quelle surface l’architecte est-il obligatoire ?

L'architecte devient obligatoire dès que la surface de plancher totale après travaux dépasse 150 m². Ce seuil s'applique uniquement aux permis de construire, jamais aux déclarations préalables. Pour une extension, additionnez la surface existante et la surface créée : si le total dépasse 150 m², vous devez faire appel à un architecte. Pour les exploitations agricoles, le seuil est relevé à 800 m² (article R431-2 du Code de l'urbanisme).

Quelle surface de carport sans autorisation ?

Un carport (abri voiture ouvert) ne crée pas de surface de plancher car il n'est pas clos, mais il crée de l'emprise au sol. En dessous de 5 m², aucune autorisation n'est requise. De 5 à 20 m², une déclaration préalable est nécessaire. Au-delà de 20 m², un permis de construire s'impose. Ces seuils s'appliquent à l'emprise au sol, soit la projection verticale de la structure (poteaux + toiture).

Quelle surface maximum pour une déclaration préalable ?

La surface maximum pour une déclaration préalable dépend de la zone et du type de travaux. En zone standard (hors PLU, carte communale) : 20 m² maximum de surface de plancher ou d'emprise au sol. En zone urbaine (U) d'un PLU : 40 m² maximum pour les extensions, à condition que le total après travaux ne dépasse pas 150 m². Au-delà de ces seuils, un permis de construire devient obligatoire.

Quelle surface d’abri de jardin sans autorisation ?

Un abri de jardin ne nécessite aucune autorisation s'il fait moins de 5 m² d'emprise au sol ET moins de 12 m de hauteur (article R421-2 du Code de l'urbanisme). Entre 5 et 20 m², une déclaration préalable est requise. Au-delà de 20 m², un permis de construire s'impose. Attention : en zone protégée (ABF, site classé), toute construction nécessite une autorisation, quelle que soit sa surface.

Le lotissement impose-t-il des règles de surface particulières ?

Oui, le règlement de lotissement peut fixer des règles de constructibilité propres : surface de plancher maximale, coefficient d'emprise au sol, hauteur limite. Le certificat PCMI9 atteste des surfaces constructibles restantes sur un lot. Ces règles s'ajoutent à celles du PLU. Avant tout projet en lotissement, vérifiez le cahier des charges et le règlement pour connaître vos droits à construire.

Conclusion

La distinction entre surface de plancher et surface habitable n'est pas qu'une subtilité administrative. Elle détermine concrètement le type d'autorisation à demander, le recours ou non à un architecte, et les taxes à payer.

Ce qu'il faut retenir :

  • La surface de plancher (SDP) sert pour l'urbanisme : autorisations, seuils, droits à construire
  • La surface habitable (SHAB) sert pour le locatif et la fiscalité
  • La SDP est toujours supérieure à la SHAB (5 à 10 % de plus)
  • Les seuils clés : 5 m² (dispense), 20/40 m² (DP vs PC), 150 m² (architecte)
  • Calculez depuis le nu intérieur des façades, déduisez les espaces < 1,80 m

Un conseil pratique : en cas de doute sur votre calcul, demandez un certificat d'urbanisme (CUa) à la mairie. Ce document gratuit vous confirmera les règles applicables à votre parcelle et vous évitera les mauvaises surprises lors de l'instruction de votre dossier.

La durée de validité de votre permis est de 3 ans : prenez le temps de bien calculer vos surfaces avant de vous lancer.


Sources : Code de l'urbanisme (articles R111-22, R421-1 à R421-17, R431-2), Code de la construction (R156-1), Legifrance, Service-public.fr