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Panneaux Solaires au Sol : Quelle Autorisation d’Urbanisme ?

Panneaux Solaires au Sol : Faut-il un Permis de Construire ?

Temps de lecture : 11 minutes

Vous souhaitez installer des panneaux photovoltaïques au sol dans votre jardin plutôt que sur votre toiture ? Cette solution présente des avantages : orientation optimale, entretien facilité, possibilité de plus grande puissance. Mais elle est aussi plus encadrée par l'urbanisme. Contrairement aux panneaux solaires en toiture, l'installation solaire au sol crée une emprise au sol et modifie l'aspect du terrain. Selon la puissance installée, une déclaration préalable ou un permis de construire sera nécessaire. En secteur ABF, l'avis de l'Architecte des Bâtiments de France peut bloquer le projet. Cet article vous explique les règles applicables, les démarches administratives et les pièges à éviter.

Sommaire

Les règles d'autorisation selon la puissance

Le cadre légal des panneaux solaires au sol

Les panneaux photovoltaïques au sol sont considérés comme des constructions au sens du Code de l'urbanisme. L'article R421-9 définit les seuils d'autorisation en fonction de la puissance crête de l'installation (exprimée en kWc ou kilowatts-crête) :

Puissance installée Autorisation requise
≤ 3 kWc Aucune formalité (hors secteur protégé)
> 3 kWc et ≤ 250 kWc Déclaration préalable
> 250 kWc Permis de construire

Pour un particulier, les installations domestiques dépassent rarement 9 kWc (environ 25 m² de panneaux). La déclaration préalable est donc la procédure la plus courante.

En secteur protégé (périmètre ABF, site inscrit/classé, zone de protection du patrimoine), une déclaration préalable est obligatoire quelle que soit la puissance, même pour une installation de 1 kWc.

Différence avec les panneaux en toiture

L'installation de panneaux solaires en toiture répond à des règles différentes. Sur un bâtiment existant, les panneaux modifient l'aspect extérieur de la toiture, ce qui déclenche une déclaration préalable pour modification de façade/toiture (article R421-17). Le plan de toiture PCMI5 doit alors montrer l'implantation des panneaux.

Au sol, les panneaux créent une nouvelle construction. L'emprise au sol des panneaux et de leur structure (châssis, fondations) détermine également les seuils, en plus de la puissance :

  • Emprise au sol ≤ 5 m² ET puissance ≤ 3 kWc : pas de formalité
  • Emprise > 5 m² OU puissance > 3 kWc : déclaration préalable
  • Emprise > 20 m² OU puissance > 250 kWc : permis de construire

Les contraintes du PLU

Le Plan Local d'Urbanisme peut :

  • Interdire les panneaux solaires au sol dans certaines zones (zone agricole A, zone naturelle N)
  • Limiter la hauteur des structures porteuses
  • Imposer un retrait par rapport aux limites séparatives
  • Réglementer l'aspect extérieur (couleur des châssis, intégration paysagère)

Certains PLU sont favorables aux énergies renouvelables et autorisent explicitement les installations photovoltaïques dans toutes les zones. D'autres sont plus restrictifs. Consultez le règlement de zone avant de vous engager.

Le cas particulier des zones ABF

En périmètre de protection des monuments historiques (500 m) ou en secteur sauvegardé, l'avis de l'ABF (Architecte des Bâtiments de France) est requis. Les panneaux solaires au sol sont souvent refusés dans ces zones car jugés incompatibles avec la préservation du patrimoine.

Avant de déposer une déclaration préalable en zone ABF, prenez rendez-vous avec l'unité départementale de l'architecture et du patrimoine (UDAP) pour présenter votre projet. Cette démarche informelle permet d'anticiper un éventuel refus et d'adapter le projet (emplacement, intégration paysagère).

La procédure de déclaration

Constituer le dossier de déclaration préalable

Pour une installation de panneaux photovoltaïques au sol de plus de 3 kWc, le dossier de déclaration préalable comprend :

  • DP1 : Plan de situation du terrain dans la commune
  • DP2 : Plan de masse pour déclaration préalable indiquant l'emplacement des panneaux, leur surface, la distance aux limites
  • DP3 : Plan de coupe montrant le terrain et la hauteur des panneaux
  • DP4 : Notice descriptive (puissance, matériaux, couleurs)
  • DP5 : Plan de façade des panneaux (vue de face et de profil)
  • DP6/DP7 : Photographies de l'environnement proche
  • DP8 : Photographie de l'environnement lointain

Le formulaire CERFA de déclaration préalable (CERFA 13703) sert de base au dossier. Remplissez le cadre relatif aux "autres constructions" en indiquant la puissance en kWc et la surface d'emprise au sol.

Déposer le dossier en mairie

Le dépôt du dossier peut se faire :

  • En mairie au guichet (2 exemplaires minimum)
  • Par voie postale en recommandé avec AR
  • En ligne via le téléservice de la commune (si disponible)

Un récépissé vous est remis avec le numéro de dossier et la date de dépôt. Les délais d'instruction courent à compter de cette date :

  • 1 mois en zone ordinaire
  • 2 mois en secteur ABF

À défaut de réponse dans ce délai, la non-opposition est tacite : vous pouvez commencer les travaux. Cependant, demandez un certificat de non-opposition pour sécuriser votre situation.

Les aides financières

L'installation de panneaux solaires peut bénéficier d'aides :

  • Prime à l'autoconsommation : versée par EDF OA pour les installations en autoconsommation avec vente du surplus (environ 80 à 380 €/kWc selon la puissance)
  • TVA réduite à 10 % : pour les installations ≤ 3 kWc sur résidence principale de plus de 2 ans
  • Obligation d'achat : EDF doit racheter votre surplus ou votre production totale à un tarif fixé par arrêté

Ces aides concernent aussi bien les panneaux en toiture qu'au sol. Pour l'isolation extérieure ou le chauffe-eau solaire, d'autres dispositifs existent (MaPrimeRénov', CEE).

Exemples d'installations au sol

Exemple 1 : Installation de 6 kWc en zone résidentielle

Situation : M. Martin possède une maison de plain-pied avec un toit à faible pente orienté nord. Il souhaite installer 6 kWc de panneaux solaires (environ 16 m²) au sol dans son jardin de 500 m², orientés plein sud.

Analyse : Puissance > 3 kWc → déclaration préalable obligatoire. Zone UB du PLU : les constructions annexes sont autorisées avec un retrait de 3 m par rapport aux limites.

Démarches :

  1. Vérification du PLU : panneaux autorisés, retrait de 3 m respecté
  2. Dépôt de la déclaration préalable avec plan de masse coté
  3. Instruction : 1 mois, non-opposition
  4. Installation après affichage de 2 mois

Coût : panneaux + onduleur + structure (7 500 €), installation (2 500 €), raccordement Enedis (1 000 €). Total : 11 000 €. Production estimée : 7 200 kWh/an, soit 1 500 € d'économie annuelle (autoconsommation + revente surplus).

Exemple 2 : Refus en zone ABF

Situation : Mme Dupont habite à 300 m d'une église classée. Elle souhaite installer 4 kWc de panneaux au sol.

Analyse : Périmètre ABF → déclaration préalable avec avis conforme de l'ABF.

Résultat : L'ABF refuse : "Les panneaux photovoltaïques au sol créeraient une co-visibilité avec le clocher de l'église depuis le chemin communal." La déclaration préalable est refusée.

Alternative : Mme Dupont opte pour des panneaux intégrés en toiture, moins visibles. L'ABF accepte cette solution avec prescription de couleur de cadre (noir mat).

Exemple 3 : Grande installation de 9 kWc sur terrain agricole

Situation : Un agriculteur souhaite installer 9 kWc de panneaux au sol sur une parcelle classée A (agricole) pour alimenter son exploitation.

Analyse : Zone A → vérifier si le PLU autorise les constructions liées à l'activité agricole. L'installation photovoltaïque doit être nécessaire à l'exploitation.

Résultat : Le PLU autorise les "constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole". L'installation est considérée comme nécessaire (alimentation des bâtiments d'élevage). Déclaration préalable accordée.

Attention : si l'installation était destinée uniquement à la revente sans lien avec l'exploitation, elle pourrait être refusée en zone A.

Erreurs à éviter

Erreur 1 : Installer sans autorisation en pensant que "c'est petit"

Même une installation de 4 kWc (10 m² de panneaux) nécessite une déclaration préalable. L'argument "c'est dans mon jardin, je fais ce que je veux" ne tient pas face au droit de l'urbanisme. Sans autorisation, vous risquez une amende et l'obligation de déposer les panneaux.

Comme pour une extension de 20 m² ou une terrasse et pergola, la démarche administrative est simple et rapide. Ne la négligez pas.

Erreur 2 : Oublier les distances aux limites

Le PLU impose généralement un retrait par rapport aux limites séparatives. Des panneaux installés à 50 cm de la clôture peuvent être contestés par le voisin ou la mairie. Vérifiez l'article 7 du règlement de zone et respectez les distances.

Erreur 3 : Négliger l'ombrage

Des panneaux solaires ombragés par des arbres, une haie ou un bâtiment voisin perdent 30 à 50 % de leur rendement. Analysez l'ombrage sur l'ensemble de la journée et de l'année (le soleil est plus bas en hiver) avant de choisir l'emplacement.

Erreur 4 : Ne pas vérifier le PLU en zone agricole ou naturelle

En zone A (agricole) ou N (naturelle), les constructions sont très encadrées. Une installation photovoltaïque non liée à une exploitation agricole sera probablement refusée. Consultez le PLU et demandez un certificat d'urbanisme opérationnel avant d'investir.

Erreur 5 : Ignorer l'autorisation du bailleur ou de la copropriété

Si vous êtes locataire, l'accord du propriétaire est nécessaire. En copropriété, l'installation au sol sur les parties communes requiert un vote en assemblée générale. Pour une installation sur votre lot privatif (jardin privatif), vérifiez le règlement de copropriété. Comme pour l'autorisation de pose d'un portail, les règles de copropriété peuvent ajouter des contraintes.

Questions fréquentes

Faut-il une autorisation pour des panneaux solaires au sol ?

Oui, dans la plupart des cas. Une installation de panneaux photovoltaïques au sol de plus de 3 kWc nécessite une déclaration préalable (article R421-9 du Code de l'urbanisme). En dessous de 3 kWc, aucune formalité n'est requise sauf en secteur protégé (ABF, site classé). Au-delà de 250 kWc, un permis de construire est obligatoire. En zone ABF, une déclaration préalable est toujours requise, quelle que soit la puissance.

Panneaux solaires en zone ABF : est-ce autorisé ?

C'est possible mais soumis à l'avis conforme de l'ABF. Les panneaux au sol sont souvent refusés car jugés trop visibles et incompatibles avec la préservation du patrimoine. Les panneaux en toiture intégrés sont généralement mieux acceptés, sous conditions (couleur, emplacement non visible depuis les points remarquables). Avant de déposer, consultez l'UDAP pour connaître la position de l'ABF sur votre secteur.

Combien coûte une installation de panneaux solaires au sol ?

Une installation au sol coûte en moyenne 1 500 à 2 000 € par kWc tout compris (panneaux, onduleur, structure, pose, raccordement). Pour 6 kWc (environ 16 m²), comptez 9 000 à 12 000 €. C'est légèrement plus cher qu'une installation en toiture (1 200 à 1 800 €/kWc) en raison de la structure au sol (châssis, fondations). Le retour sur investissement est de 8 à 12 ans selon l'ensoleillement et le tarif de rachat. La prime à l'autoconsommation réduit ce délai.

Le PLU peut-il interdire les panneaux solaires ?

Oui, le PLU peut réglementer ou interdire les panneaux solaires au sol dans certaines zones. En zone A (agricole) ou N (naturelle), seules les constructions nécessaires à l'exploitation agricole ou forestière sont autorisées. En zone urbaine, le PLU peut imposer des retraits, des hauteurs maximales ou des prescriptions esthétiques. Cependant, depuis la loi ELAN, les PLU ne peuvent plus interdire purement et simplement les dispositifs favorisant les énergies renouvelables — ils peuvent seulement encadrer leur implantation.

Faut-il représenter les panneaux solaires sur le plan de masse ?

Oui, le plan de masse (DP2 ou PCMI2) doit indiquer l'implantation exacte des panneaux : surface occupée, distance aux limites séparatives, distance aux constructions existantes, orientation. Le plan de coupe (DP3) montre la hauteur de la structure. Le plan de façade (DP5) représente les panneaux vus de face et de profil. Ces pièces permettent à l'instructeur de vérifier la conformité au PLU. Comme pour un bow-window ou une mezzanine, la représentation graphique précise est indispensable.

Quelles sont les aides pour installer des panneaux solaires ?

Les principales aides sont : la prime à l'autoconsommation (80 à 380 €/kWc versés sur 5 ans), la TVA à 10 % pour les installations ≤ 3 kWc sur résidence de plus de 2 ans, et l'obligation d'achat du surplus par EDF (tarif fixé par arrêté). Certaines collectivités proposent des aides complémentaires. Les panneaux solaires ne sont pas éligibles à MaPrimeRénov', contrairement à l'isolation ou aux systèmes de chauffage. Vérifiez les aides locales sur le site de l'ADEME.

Conclusion

Installer des panneaux solaires au sol est un projet rentable si vous disposez d'un jardin ensoleillé et que le PLU de votre commune l'autorise. La procédure administrative est simple pour les installations domestiques : une déclaration préalable au-delà de 3 kWc, instruite en 1 mois.

Les points de vigilance : le PLU et ses contraintes de zone, le périmètre ABF qui peut bloquer le projet, et les distances aux limites séparatives. Un kit solaire de quelques panneaux peut sembler anodin, mais l'urbanisme s'y applique comme à toute construction.

Avant de commander votre installation photovoltaïque, vérifiez le règlement de zone, prenez contact avec la mairie si vous êtes en secteur protégé, et choisissez un emplacement optimal (orientation sud, absence d'ombrage). Les économies d'énergie compenseront largement les quelques semaines de démarches administratives.


Sources : Legifrance (Code de l'urbanisme articles R421-9, R421-17), Service-public.fr, ADEME