Mur de Soutènement : Déclaration Préalable Nécessaire ?
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Votre terrain présente une pente importante et vous envisagez de construire un mur de soutènement pour retenir les terres ? Ou peut-être souhaitez-vous simplement édifier un mur de clôture pour délimiter votre propriété ? Ces constructions, souvent perçues comme anodines, sont en réalité encadrées par des règles d'urbanisme précises. Hauteur, matériaux, implantation par rapport aux limites séparatives : chaque paramètre compte. En 15 ans de pratique en urbanisme, j'ai vu des propriétaires recevoir des amendes de plusieurs milliers d'euros pour un mur construit sans autorisation. Ce n'est pas une fatalité : avec les bonnes informations, vous pouvez mener votre projet sereinement et en toute légalité.
Sommaire
- Qu'est-ce qu'un mur de soutènement ?
- Quelle autorisation pour construire un mur ?
- Procédure de déclaration préalable
- Cas pratiques et exemples
- Règles spécifiques selon les matériaux
- Erreurs à éviter
- Questions fréquentes
- Conclusion
Qu'est-ce qu'un mur de soutènement ?
Un mur de soutènement est une construction en maçonnerie dont la fonction principale est de retenir les terres d'un terrain en pente. Contrairement au simple mur de clôture qui délimite une propriété, le mur de soutènement joue un rôle structurel essentiel : il empêche le glissement ou l'effondrement des terres.
Distinction juridique importante
Le Code de l'urbanisme ne distingue pas explicitement le mur de soutènement du mur de clôture dans ses articles R421-9 à R421-12. C'est la jurisprudence qui a précisé cette distinction :
- Mur de clôture : délimite une propriété, peut être en parpaing, en pierre, en brique ou en béton
- Mur de soutènement : retient des terres, nécessite des fondations adaptées et un dimensionnement technique
- Mur mitoyen : construit sur la limite séparative entre deux propriétés, régi par les articles 653 à 673 du Code civil
En pratique, un même mur peut cumuler plusieurs fonctions : retenir des terres ET clôturer un terrain. Dans ce cas, c'est la fonction principale qui détermine le régime applicable.
Le cadre réglementaire
La réglementation varie selon plusieurs critères définis dans le PLU (Plan Local d'Urbanisme) de votre commune :
| Critère | Règle générale | Particularité PLU |
|---|---|---|
| Hauteur maximale | 2 m sans autorisation | Souvent inférieure (1,80 m en façade sur rue) |
| Distance aux limites | Variable | Définie à l'article 7 du règlement de zone |
| Matériaux | Libre | Peut être imposé (enduit, couleur) |
| Zone ABF | Déclaration systématique | Avis de l'Architecte des Bâtiments de France |
La hauteur maximale autorisée sans formalité est généralement de 2 mètres. Au-delà, une déclaration préalable devient obligatoire selon l'article R421-12 du Code de l'urbanisme.
Quelle autorisation pour construire un mur ?
Le principe : dispense sous 2 mètres
L'article R421-2 du Code de l'urbanisme pose le principe : les murs de clôture d'une hauteur inférieure ou égale à 2 mètres sont dispensés de toute formalité, sauf si :
- Le PLU de la commune impose une déclaration préalable pour toutes les clôtures
- Le terrain se situe en secteur sauvegardé ou dans le périmètre d'un monument historique (zone ABF)
- Le terrain est situé dans un site inscrit ou classé
- Le lotissement comporte un cahier des charges imposant des prescriptions
Tableau récapitulatif des autorisations
| Type de mur | Hauteur | Zone standard | Zone ABF/protégée |
|---|---|---|---|
| Mur de clôture | ≤ 2 m | Aucune formalité | Déclaration préalable |
| Mur de clôture | > 2 m | Déclaration préalable | Déclaration préalable |
| Mur de soutènement | ≤ 2 m | Aucune formalité* | Déclaration préalable |
| Mur de soutènement | > 2 m | Déclaration préalable | Déclaration préalable |
*La jurisprudence considère parfois le mur de soutènement comme un "ouvrage technique" nécessitant une autorisation même sous 2 m, notamment s'il modifie significativement le terrain naturel.
Le cas du mur privatif vs mur mitoyen
Édifier un mur privatif sur votre terrain est plus simple qu'un mur mitoyen :
- Mur privatif : vous êtes seul maître à bord, mais devez respecter les distances aux limites séparatives
- Mur mitoyen : nécessite l'accord du voisin et le partage des coûts (articles 653-673 du Code civil)
Le pétitionnaire de l'autorisation d'urbanisme doit justifier d'un titre l'habilitant à construire (propriétaire, titulaire d'une promesse de vente, etc.).
Procédure de déclaration préalable
Étape 1 : Consulter le PLU de votre commune
Avant tout, rendez-vous en mairie ou sur le site du géoportail de l'urbanisme pour consulter le PLU. Vous y trouverez :
- La zone dans laquelle se situe votre terrain (U, AU, A, N)
- Les règles de hauteur maximale applicables
- Les prescriptions sur les matériaux et l'aspect extérieur
- Les distances minimales à respecter par rapport aux limites
Étape 2 : Constituer le dossier de déclaration préalable
Le formulaire CERFA 13703*08 (ou 16702 depuis 2025) est à remplir avec les pièces suivantes :
| Pièce | Description | Obligatoire |
|---|---|---|
| DP1 | Plan de situation du terrain | Oui |
| DP2 | Plan de masse coté dans les 3 dimensions | Oui |
| DP3 | Plan de coupe du terrain et de la construction | Si modification du terrain |
| DP4 | Plan des façades et des toitures | Oui |
| DP6 | Document graphique d'insertion | Recommandé |
| DP7 | Photographie de l'environnement proche | Oui |
| DP8 | Photographie de l'environnement lointain | Oui |
Pour le plan de masse, indiquez précisément :
- Les dimensions du mur (longueur, hauteur, épaisseur)
- La distance aux limites séparatives
- L'implantation par rapport aux constructions existantes
La différence entre plan de masse et plan de situation est fondamentale : le plan de situation localise votre terrain dans la commune, le plan de masse montre l'implantation du projet sur la parcelle.
Étape 3 : Déposer le dossier
Le dépôt peut se faire :
- En mairie, contre récépissé de dépôt
- Par courrier recommandé avec accusé de réception
- En ligne via la plateforme de votre commune (si disponible)
Le nombre d'exemplaires requis est généralement de 4 (5 en zone ABF).
Étape 4 : Instruction et réponse
| Délai | Situation | Résultat |
|---|---|---|
| 1 mois | Zone standard | Arrêté de non-opposition ou décision tacite |
| 2 mois | Zone ABF | Avis de l'ABF requis |
| Variable | Demande de pièces complémentaires | Le délai repart à zéro |
Passé le délai d'instruction sans réponse de la mairie, vous bénéficiez d'une décision tacite de non-opposition. Demandez toutefois un certificat de non-opposition pour vous en prévaloir auprès des tiers.
Étape 5 : Affichage et travaux
Une fois l'autorisation obtenue :
- Affichez le panneau réglementaire sur le terrain (visible de la voie publique)
- Attendez au moins 1 jour franc avant de commencer
- Conservez l'affichage pendant toute la durée des travaux
- Les tiers disposent de 2 mois pour contester
Cas pratiques et exemples
Exemple 1 : Mur de soutènement en béton de 2,50 m
Situation : M. Dupont souhaite aménager son terrain en pente à Marseille. Le projet nécessite un mur de soutènement de 2,50 m de hauteur sur 15 mètres de long.
Analyse :
- Hauteur > 2 m → Déclaration préalable obligatoire
- Zone U du PLU → Vérifier l'article 11 (aspect extérieur)
- Coût estimé du mur : 15 m × 2,50 m × 250 €/m² = 9 375 € (mur béton banché)
Pièces à fournir : DP1, DP2 avec cotation précise, DP3 (coupe sur terrain montrant le dénivelé), DP4, DP7, DP8.
Si vous avez des doutes sur le plan de masse, consultez nos exemples annotés pour vous guider.
Exemple 2 : Mur de clôture en pierre de 1,80 m
Situation : Mme Martin veut construire un mur en pierre pour clôturer son jardin à Lyon, en zone U du PLU.
Analyse :
- Hauteur 1,80 m < 2 m → Aucune formalité en zone standard
- PLU de Lyon : vérifier si déclaration imposée pour les clôtures
- Pas en zone ABF → Pas besoin d'avis de l'ABF
- Coût estimé : 10 m × 1,80 m × 350 €/m² = 6 300 € (mur en pierre sèche)
Conseil pratique : Même sans obligation, prévenez vos voisins pour éviter les conflits ultérieurs.
Exemple 3 : Mur de jardin mitoyen en parpaing
Situation : Les familles Durand et Petit souhaitent édifier un mur mitoyen en parpaing de 2 m sur leur limite séparative à Nantes.
Analyse :
- Mur mitoyen → Accord écrit des deux parties nécessaire
- Hauteur 2 m → À la limite, vérifier le PLU de Nantes
- Le PLU impose une déclaration pour les clôtures → Déclaration préalable requise
- Partage des coûts : 50/50 selon le Code civil
- Coût total estimé : 12 m × 2 m × 180 €/m² = 4 320 € (parpaing enduit)
Point de vigilance : Le mur mitoyen appartient aux deux propriétaires. Toute modification ultérieure nécessite l'accord des deux parties.
Règles spécifiques selon les matériaux
Mur en parpaing
Le mur en parpaing (bloc béton) est la solution la plus économique :
- Coût : 150 à 200 €/m² (pose comprise)
- Nécessite un enduit de finition (imposé par la plupart des PLU)
- Fondations : semelle béton de 40 cm minimum pour un mur de 2 m
- Ferraillage : poteaux raidisseurs tous les 2,50 m
Mur en pierre
Le mur en pierre offre un aspect authentique prisé en zone rurale :
- Coût : 300 à 500 €/m² selon le type de pierre
- Pierre sèche ou pierre jointoyée
- Souvent imposé en zone ABF ou secteur sauvegardé
- Épaisseur minimum : 40 cm pour un mur de 2 m
Mur en brique
Le mur en brique traditionnelle est rare pour les clôtures mais courant en rénovation :
- Coût : 200 à 350 €/m²
- Brique pleine ou brique de parement
- Aspect chaleureux, bien intégré au bâti ancien
Mur béton banché
Le mur béton banché est la solution technique pour les murs de soutènement importants :
- Coût : 250 à 400 €/m² selon la hauteur
- Dimensionnement par un bureau d'études structure
- Drainage arrière indispensable (barbacanes)
- Fondations dimensionnées selon la poussée des terres
Pour un projet complexe sur terrain en pente, faites appel à un géomètre pour le plan de masse afin d'avoir des cotes précises du terrain naturel.
Erreurs à éviter
Erreur n°1 : Ignorer le PLU de sa commune
Le piège : Supposer que la règle des 2 m s'applique partout.
La réalité : De nombreuses communes imposent des hauteurs maximales plus restrictives (1,60 m, 1,80 m) ou des prescriptions sur les matériaux. Certaines exigent une déclaration préalable pour TOUTES les clôtures, quelle que soit leur hauteur.
La solution : Consultez TOUJOURS le PLU avant de commencer, même pour un petit mur.
Erreur n°2 : Oublier la zone ABF
Le piège : Construire un mur dans le périmètre d'un monument historique sans autorisation.
La réalité : Dans un rayon de 500 m autour d'un monument historique, l'avis de l'Architecte des Bâtiments de France est obligatoire. Une déclaration préalable est systématiquement requise, même pour un mur de moins de 2 m.
La solution : Vérifiez sur le site Atlas des patrimoines si votre terrain est concerné.
Erreur n°3 : Sous-dimensionner les fondations
Le piège : Économiser sur les fondations d'un mur de soutènement.
La réalité : Un mur de soutènement mal dimensionné peut s'effondrer sous la poussée des terres, surtout après de fortes pluies. La responsabilité du propriétaire est alors engagée.
La solution : Pour un mur de soutènement de plus de 1,50 m, faites établir une note de calcul par un bureau d'études structure. Prévoyez un drainage efficace.
Erreur n°4 : Construire sur la limite sans accord
Le piège : Édifier un mur exactement sur la limite séparative sans consulter le voisin.
La réalité : Un mur construit sur la limite devient automatiquement mitoyen si le voisin le revendique (article 661 du Code civil). Il peut exiger le remboursement de la moitié des frais.
La solution : Soit vous construisez en retrait de votre côté (mur privatif), soit vous obtenez un accord écrit du voisin pour un mur mitoyen.
Erreur n°5 : Ne pas afficher l'autorisation
Le piège : Commencer les travaux dès réception de l'arrêté de non-opposition sans afficher.
La réalité : L'absence d'affichage ne fait pas courir le délai de recours des tiers. Un voisin pourrait contester votre mur pendant 6 mois, voire plus.
La solution : Affichez le panneau réglementaire (dimensions 80 × 120 cm minimum) visible de la voie publique, pendant toute la durée des travaux et au minimum 2 mois.
Questions fréquentes
Faut-il une autorisation pour construire un mur ?
Cela dépend de la hauteur et de la localisation. En zone standard, un mur de clôture de moins de 2 mètres est dispensé de formalité. Au-delà de 2 m, une déclaration préalable est obligatoire (articles R421-9 et R421-12 du Code de l'urbanisme). En secteur protégé (ABF, site inscrit), toute clôture nécessite une déclaration, quelle que soit sa hauteur. Vérifiez toujours le PLU de votre commune qui peut imposer des règles plus strictes.
Quelle hauteur de mur sans autorisation ?
La hauteur maximale sans autorisation est de 2 mètres en règle générale. Toutefois, cette limite peut être abaissée par le PLU de votre commune (1,80 m, 1,60 m, voire moins en façade sur rue). De plus, si votre commune a institué la déclaration préalable pour toutes les clôtures, vous devrez déposer un dossier même pour un mur de 1 mètre. La hauteur maximale de clôture sans autorisation varie donc selon les communes.
Peut-on casser un mur porteur sans autorisation ?
La suppression ou la modification d'un mur porteur nécessite généralement une déclaration préalable, car elle modifie la structure du bâtiment. Pour percer un mur porteur, vous devez faire établir une étude structure par un bureau d'études, puis déposer une déclaration préalable si les travaux ne modifient pas l'aspect extérieur, ou un permis de construire dans le cas contraire. En copropriété, l'autorisation de l'assemblée générale est également requise.
Mur mitoyen : qui paie ?
Pour un mur mitoyen, les frais de construction et d'entretien sont partagés à parts égales entre les deux propriétaires (article 655 du Code civil). Si un seul propriétaire souhaite surélever le mur mitoyen, il en assume seul le coût et l'exhaussement lui appartient en propre. L'autre propriétaire peut toutefois acquérir la mitoyenneté de l'exhaussement en payant la moitié des frais. Pour les réparations, la charge est proportionnelle au droit de chacun dans la mitoyenneté.
Hauteur maximum d’un mur de clôture ?
La hauteur maximum d'un mur de clôture est définie par le PLU de chaque commune. En l'absence de PLU, l'article 663 du Code civil fixe la hauteur à 3,20 m dans les villes de plus de 50 000 habitants et 2,60 m dans les autres communes. En pratique, les PLU limitent généralement la hauteur à 2 m en limite séparative et 1,60 à 1,80 m en façade sur rue. La partie du mur dépassant ces limites nécessite une dérogation ou ne sera pas autorisée.
Combien coûte un mur en parpaing au m² ?
Le coût d'un mur en parpaing se situe entre 150 et 200 €/m² pose comprise, incluant les fondations, le ferraillage et l'enduit de finition. Pour un mur de 10 m de long sur 2 m de haut (20 m²), comptez entre 3 000 et 4 000 €. Ce tarif peut varier selon la région, l'accessibilité du chantier et la complexité (terrain en pente, mur de soutènement). Un mur de soutènement en béton banché coûte 250 à 400 €/m² en raison du dimensionnement technique requis.
Quelle autorisation pour un mur de clôture ?
Pour un mur de clôture, l'autorisation requise dépend de la hauteur et de la zone : aucune formalité si hauteur ≤ 2 m en zone standard, déclaration préalable si hauteur > 2 m ou en zone protégée (ABF). Certaines communes exigent une déclaration pour toutes les clôtures. Le dossier comprend le formulaire CERFA 13703, un plan de situation, un plan de masse, un plan des façades et des photographies. Le délai d'instruction est de 1 mois (2 mois en zone ABF). Pour un portail et une clôture, les mêmes règles s'appliquent.
Conclusion
Construire un mur de soutènement ou un mur de clôture n'est pas anodin sur le plan administratif. Même pour un projet modeste, prenez le temps de vérifier les règles applicables : consultez le PLU, identifiez si vous êtes en zone protégée, et n'hésitez pas à vous renseigner auprès du service urbanisme de votre mairie.
En résumé :
- Mur ≤ 2 m en zone standard : généralement dispensé, mais vérifiez le PLU
- Mur > 2 m ou zone ABF : déclaration préalable obligatoire
- Mur de soutènement : faites dimensionner par un professionnel
- Mur mitoyen : obtenez l'accord écrit du voisin
Pour votre dossier, un logiciel de plan de masse gratuit peut vous aider à réaliser les plans requis. En cas de doute sur la complexité de votre terrain, un géomètre-expert vous fournira des documents fiables.
Les sanctions pour travaux sans autorisation peuvent atteindre 6 000 € par m² de surface construite (article L480-4 du Code de l'urbanisme), sans compter le risque de démolition ordonnée par le tribunal. Un simple mur de 20 m² construit illégalement peut donc coûter jusqu'à 120 000 € d'amende. La déclaration préalable est gratuite : autant faire les choses dans les règles.
Sources : Code de l'urbanisme (Legifrance), Service-public.fr, Code civil (articles 653-673)
