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Lotissement : Règles et Formalités

Lotissement : Procédure, Permis d'Aménager et Règles d'Urbanisme

Temps de lecture : 12 minutes

Vous envisagez d'acheter un terrain en lotissement ou de diviser votre propriété pour créer des lots constructibles ? Le lotissement est encadré par des règles précises du Code de l'urbanisme qui déterminent les autorisations nécessaires, les délais d'instruction et les contraintes de construction. La division parcellaire d'une propriété foncière en plusieurs lots destinés à être bâtis nécessite soit un permis d'aménager, soit une déclaration préalable selon la complexité du projet. Voici ce que vous devez savoir avant de vous lancer dans une opération de lotissement urbanisme.

Sommaire

Qu'est-ce qu'un lotissement ?

Définition juridique

Le lotissement est défini par l'article L442-1 du Code de l'urbanisme comme « la division en propriété ou en jouissance d'une unité foncière ou de plusieurs unités foncières contiguës ayant pour objet de créer un ou plusieurs lots destinés à être bâtis ».

Concrètement, dès que vous divisez un terrain pour vendre des parcelles destinées à la construction, vous réalisez un lotissement. Cette opération se distingue de la simple division parcellaire (partage entre héritiers, par exemple) par la destination constructible des lots créés.

Lotissement vs division parcellaire simple

La confusion est fréquente. Voici la différence :

Critère Lotissement Division parcellaire simple
Destination Lots destinés à être bâtis Partage sans projet de construction
Autorisation Permis d'aménager ou DP Déclaration au cadastre
Voiries/réseaux Création possible Non concerné
Règlement propre Possible (10 ans) Non
Intervenants Géomètre-expert, aménageur Géomètre, notaire

La division terrain lotissement suppose une intention de construire. Si vous divisez votre jardin pour vendre une parcelle comme terrain à bâtir, c'est un lotissement, même si vous ne créez qu'un seul lot.

Cadre réglementaire

Les articles R421-19 et suivants du Code de l'urbanisme définissent les seuils et les procédures. Le permis aménager lotissement est obligatoire dès lors que l'opération prévoit :

  • La création de voies, espaces ou équipements communs
  • Ou la situation dans un secteur sauvegardé, site classé ou réserve naturelle

À défaut, une déclaration préalable suffit pour les divisions créant des lots destinés à l'implantation de bâtiments.

Quelle autorisation pour créer un lotissement ?

Déclaration préalable ou permis d'aménager

Déclaration préalable (DP)

La déclaration préalable lotissement s'applique aux divisions simples sans création d'équipements communs :

  • Division d'un terrain en 2 lots constructibles
  • Division de terrain détaché d'une propriété bâtie
  • Aucune voie, espace vert ou réseau commun créé

Formulaire CERFA 13702. Délai d'instruction : 1 mois (2 mois si secteur protégé).

Permis d'aménager (PA)

Le permis d'aménager est obligatoire si :

  • Création de voies, espaces verts ou équipements communs
  • Opération située en secteur sauvegardé ou site classé
  • Plus de 2 lots dans certains cas réglementés localement

Formulaire CERFA 13409 (remplacé par CERFA 16297 depuis juillet 2024). Délai d'instruction : 3 mois (4 mois si site patrimonial, 5 mois si autorisation d'exploitation commerciale requise).

Le rôle du géomètre-expert

Le géomètre-expert est indispensable pour toute opération de lotissement. Ses missions :

  1. Bornage contradictoire : Fixation définitive des limites avec les propriétaires voisins
  2. Division parcellaire : Création des nouvelles références cadastrales
  3. Document d'arpentage : Établissement du plan de division officiel
  4. Calcul de surface : Détermination des surfaces exactes des lots
  5. Plan de composition : Implantation des lots et des équipements

Coût moyen : 1 500 à 4 000 € selon la complexité (nombre de lots, bornage, équipements). Pour un plan de masse précis, le géomètre est souvent le meilleur interlocuteur.

Les seuils à connaître

Situation Autorisation Délai
1 lot détaché sans équipement commun DP 1 mois
2+ lots sans équipement commun DP 1 mois
Tout lot avec voie ou espace commun PA 3 mois
Secteur sauvegardé/site classé PA 4-5 mois
Surface > 2 500 m² PA + architecte/paysagiste 3 mois

La procédure du permis d'aménager

Constitution du dossier

Le dossier de permis d'aménager comprend :

Pièces obligatoires (PA1 à PA10) :

  • PA1 : Plan de situation du terrain
  • PA2 : Notice de présentation du projet
  • PA3 : Plan de l'état actuel du terrain
  • PA4 : Plan de composition du lotissement
  • PA5 : Programme des travaux (voiries, réseaux)
  • PA6 : Document graphique d'insertion
  • PA7 : Projet architectural et paysager (si requis)

Pièces complémentaires selon les cas :

  • Attestation de conformité aux règles d'accessibilité
  • Étude d'impact environnemental (si seuils dépassés)
  • Avis des concessionnaires de réseaux

Étapes de l'instruction

  1. Dépôt du dossier en mairie (4 exemplaires minimum)
  2. Accusé de réception avec numéro d'enregistrement (sous 1 mois)
  3. Notification du délai d'instruction (3 mois par défaut)
  4. Consultations : services techniques, ABF si concerné, autres administrations
  5. Décision : arrêté d'autorisation ou refus motivé

La commercialisation des lots

Après obtention du permis d'aménager, le lotisseur peut :

Vente en VEFA (Vente en l'État Futur d'Achèvement) :

  • Vente des lots avant achèvement des travaux d'aménagement
  • Garantie d'achèvement obligatoire
  • Intervention du notaire pour l'acte authentique

Vente après achèvement :

  • Travaux de viabilisation terminés
  • Certificat de conformité des équipements
  • Lots immédiatement constructibles

Le notaire vérifie la régularité de l'opération et la conformité urbanistique avant toute vente.

Le règlement de lotissement

Contenu du règlement

Le règlement lotissement est un document contractuel qui s'impose aux acquéreurs des lots. Il peut contenir des règles plus strictes que le PLU :

Règles d'implantation :

  • Recul par rapport aux voies
  • Distances aux limites séparatives
  • Emprise au sol maximale
  • Hauteur des constructions

Règles architecturales :

  • Pente et matériaux de toiture
  • Couleurs de façade et menuiseries
  • Style architectural imposé
  • Clôtures et hauteur de clôture

Règles d'usage :

  • Destination des constructions (habitation uniquement, par exemple)
  • Interdiction d'activités professionnelles
  • Stationnement sur lot

Durée de validité

Le règlement de lotissement reste opposable pendant 10 ans à compter de la délivrance du permis d'aménager. Au-delà, seul le PLU s'applique, sauf si les colotis décident de maintenir le règlement.

Attention : Le règlement peut être modifié ou supprimé avant 10 ans par décision des 2/3 des propriétaires de lots représentant les 3/4 de la superficie, ou l'inverse.

Les servitudes de lotissement

Les servitudes de lotissement peuvent grever les lots pour diverses raisons :

  • Servitudes de passage : accès aux lots enclavés
  • Servitudes de réseaux : canalisations traversant les lots
  • Servitudes de vue : restriction des ouvertures vers certains lots
  • Servitudes d'urbanisme : non aedificandi (zone non constructible)

Ces servitudes figurent dans le cahier des charges du lotissement et sont reprises dans les actes de vente.

Construire dans un lotissement

Les avantages d'un terrain en lotissement

Construire dans un lotissement présente des avantages significatifs :

  1. Terrain viabilisé : Raccordements eau, électricité, assainissement existants
  2. Bornage effectué : Limites de propriété définitives
  3. Règles claires : Règlement de lotissement = prévisibilité
  4. Environnement maîtrisé : Homogénéité architecturale du quartier

Inconvénients potentiels :

  • Règlement parfois contraignant (style architectural imposé)
  • Charges de copropriété des espaces communs
  • Moins de liberté architecturale qu'en diffus

Les pièces spécifiques au permis de construire en lotissement

Pour déposer un permis de construire maison en lotissement, des pièces supplémentaires sont requises :

PCMI9 : Certificat de surface constructible

Le PCMI9 est délivré par le lotisseur ou le géomètre. Il atteste que le lot dispose bien d'une surface constructible et indique les règles applicables. Cette pièce remplace la copie du règlement de lotissement.

Attestation du lotisseur :

  • Confirmation que le projet respecte le règlement de lotissement
  • Signature du lotisseur ou du syndic des colotis
  • Vérification de la conformité architecturale

Les démarches simplifiées

En lotissement, certaines vérifications sont déjà effectuées :

  • Raccordabilité aux réseaux (confirmée par le PA)
  • Conformité au PLU (vérifiée lors de l'instruction du PA)
  • Limites de propriété (bornage contradictoire réalisé)

Le délai d'instruction du PC reste de 2 mois (3 mois si secteur protégé), mais les demandes de pièces complémentaires sont moins fréquentes.

Cas pratiques et exemples

Exemple 1 : Division d'un terrain de 1 200 m² en 2 lots

Contexte : M. Dupont possède un terrain de 1 200 m² en zone UB avec une maison de 110 m². Il souhaite détacher un lot de 500 m² pour le vendre comme terrain à bâtir.

Analyse :

  • Division en 2 lots (1 bâti conservé + 1 à bâtir)
  • Pas de création de voie ou d'équipement commun
  • Accès existant sur la voie publique

Autorisation requise : Déclaration préalable (CERFA 13702)

Étapes :

  1. Bornage par géomètre-expert : 800 €
  2. Dépôt DP en mairie : délai 1 mois
  3. Document d'arpentage pour le cadastre : 400 €
  4. Vente chez le notaire

Coût total : environ 1 500 € + frais de notaire

Exemple 2 : Création de 6 lots avec voie privée

Contexte : Un propriétaire souhaite lotir un terrain de 5 000 m² en 6 lots desservis par une voie privée de 4 m de large.

Analyse :

  • 6 lots constructibles
  • Création d'une voie commune
  • Réseaux à créer (EU, EP, électricité)
  • Surface > 2 500 m² : paysagiste ou architecte obligatoire

Autorisation requise : Permis d'aménager

Budget prévisionnel :

Poste Coût estimé
Géomètre (bornage, plans) 4 500 €
Architecte/paysagiste 6 000 €
Viabilisation (voirie, réseaux) 80 000 €
Frais de dossier 2 000 €
Total aménagement 92 500 €

Prix de revient par lot : 92 500 € ÷ 6 = 15 417 € + valeur foncière

Exemple 3 : Lotissement en zone AU

Contexte : Un promoteur souhaite créer 15 lots sur un terrain de 2 hectares classé en zone AU (à urbaniser) du PLU.

Particularité : La zone AU n'est pas immédiatement constructible. Il faut :

  1. Vérifier si c'est une zone 1AU (ouverte) ou 2AU (fermée)
  2. Consulter les OAP (Orientations d'Aménagement et de Programmation)
  3. Si 2AU : modification du PLU nécessaire avant tout projet

Délai estimé :

  • Zone 1AU : 6 à 12 mois (instruction PA + travaux)
  • Zone 2AU : 2 à 4 ans (modification PLU + PA + travaux)

Erreurs à éviter

Erreur 1 : Vendre avant l'obtention de l'autorisation

Vendre un lot avant d'avoir obtenu le permis d'aménager ou la déclaration préalable expose à la nullité de la vente et à des poursuites pénales. Le notaire refuse normalement de passer l'acte sans cette autorisation.

Solution : Signer uniquement des promesses de vente sous condition suspensive d'obtention du PA/DP.

Erreur 2 : Sous-estimer les coûts de viabilisation

La création de voiries et réseaux représente souvent 50% du coût total d'un lotissement. Une estimation trop optimiste peut rendre l'opération déficitaire.

Solution : Faire réaliser un chiffrage par des entreprises de VRD avant de déposer le permis d'aménager.

Erreur 3 : Ignorer le règlement de lotissement existant

Si vous achetez un terrain dans un lotissement de moins de 10 ans, le règlement de lotissement s'applique en plus du PLU. Certaines règles peuvent interdire votre projet (style architectural, couleurs, activité professionnelle).

Solution : Exiger le cahier des charges et le règlement de lotissement AVANT la signature du compromis.

Erreur 4 : Oublier les servitudes

Les servitudes de passage, de réseaux ou de vue peuvent réduire significativement la constructibilité d'un lot ou imposer des contraintes coûteuses.

Solution : Demander au notaire une analyse complète des servitudes attachées au lot.

Erreur 5 : Négliger la procédure de modification du lotissement

Modifier un règlement de lotissement après la commercialisation des lots nécessite l'accord des colotis. Sans cet accord, toute modification est inopposable aux acquéreurs.

Solution : Anticiper les besoins d'évolution lors de la rédaction initiale du règlement.

Questions fréquentes

Faut-il un permis pour créer un lotissement ?

Oui, toute création de lots destinés à la construction nécessite une autorisation d'urbanisme. Si l'opération implique la création de voies ou d'équipements communs, un permis d'aménager (PA) est obligatoire. Sinon, une simple déclaration préalable suffit. En secteur sauvegardé ou site classé, le permis d'aménager est systématiquement requis, même pour un seul lot. Le délai d'instruction est de 1 mois pour la DP, 3 mois pour le PA.

La PCMI11 est-elle obligatoire pour un lotissement ?

La PCMI11 (attestation du lotisseur) n'est pas une pièce réglementaire au sens strict, mais certaines mairies l'exigent lors du dépôt d'un permis de construire en lotissement. Elle atteste que le projet de construction respecte le règlement de lotissement. La pièce officiellement requise est la PCMI9 (certificat de surface constructible), qui doit être jointe au dossier de permis de construire déposé sur un lot de lotissement.

Faut-il un plan VRD pour un lotissement ?

Oui, le plan VRD (Voirie et Réseaux Divers) fait partie des pièces du permis d'aménager. La pièce PA5 décrit le programme des travaux d'aménagement, incluant la voirie, l'assainissement, l'alimentation en eau potable, l'électricité et les télécommunications. Ce plan est établi par un bureau d'études VRD et sert de base au chiffrage des travaux de viabilisation. Il n'est pas requis pour une simple déclaration préalable sans équipements communs.

Comment faire un plan de composition de lotissement ?

Le plan de composition (pièce PA4 du permis d'aménager) est généralement établi par un géomètre-expert ou un architecte. Il représente : la délimitation des lots avec leur numérotation et leur surface, les voies et espaces communs, les emplacements réservés aux équipements, les zones non constructibles. Le plan doit être coté et indiquer l'orientation. Pour les opérations de plus de 2 500 m², le recours à un architecte ou un paysagiste concepteur est obligatoire.

La PA3 est-elle obligatoire pour un lotissement ?

Oui, la PA3 (plan de l'état actuel du terrain) est une pièce obligatoire du dossier de permis d'aménager. Ce plan représente le terrain avant travaux : topographie, constructions existantes, végétation, limites cadastrales, accès actuels. Il sert de référence pour évaluer l'impact de l'aménagement projeté. Pour une déclaration préalable de lotissement, un plan simplifié suffit (pièce DP2).

La PA7 est-elle obligatoire pour un lotissement ?

La PA7 (projet architectural et paysager) n'est obligatoire que pour les lotissements de plus de 2 500 m² de terrain d'assiette. Dans ce cas, le recours à un architecte ou un paysagiste concepteur est requis. Pour les opérations plus petites, la pièce PA6 (document graphique d'insertion) suffit à montrer l'intégration du projet dans son environnement. Le règlement du lotissement peut toutefois imposer des prescriptions architecturales sans PA7.

La DP11 est-elle obligatoire en lotissement ?

La DP11 (attestation de prise en compte de la réglementation thermique) n'est pas requise pour une déclaration préalable de lotissement, qui ne concerne que la division foncière. Cette pièce sera exigée lors du dépôt du permis de construire sur chaque lot. En revanche, si le lotissement prévoit des constructions (PA valant PC), les attestations thermiques deviennent nécessaires pour ces constructions.

Conclusion

Le lotissement est une opération d'aménagement encadrée par le Code de l'urbanisme qui nécessite une autorisation préalable : permis d'aménager pour les opérations avec équipements communs, déclaration préalable pour les divisions simples. Le géomètre-expert est l'acteur clé de toute division parcellaire, garantissant la précision des limites et la conformité cadastrale.

Points essentiels à retenir :

  1. Anticipez les coûts : Viabilisation, géomètre, frais de dossier peuvent représenter 15 000 à 100 000 € selon la taille de l'opération.

  2. Respectez le règlement : Un règlement de lotissement contraignant peut limiter les projets de construction pendant 10 ans.

  3. Vérifiez avant d'acheter : Cahier des charges, servitudes, durée résiduelle du règlement sont des éléments déterminants.

Pour les acquéreurs de lots, le lotissement offre la sécurité d'un terrain viabilisé et borné. Pour les aménageurs, c'est une opération rentable mais technique qui nécessite l'accompagnement de professionnels : géomètre, architecte, bureau d'études VRD, notaire.

L'achat en lotissement simplifie ensuite le dépôt du permis de construire grâce au PCMI9 et aux vérifications déjà effectuées lors du permis d'aménager.


Sources : Legifrance (Code de l'urbanisme), Service-public.fr